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qui, rendu aujourd’hui à sa destination première, offre un brillant spécimen de l’art en province. Placé sous la surveillance d’un artiste distingué, M. Borelly, et d’une commission présidée par M. Charles Dufour, l’infatigable promoteur de la création, le musée d’Amiens est orné de peintures murales, très bien conçues, qui représentent les principaux épisodes de l’histoire de la Picardie et les hommes célèbres à divers titres qu’elle a vus naître. Les collections sont divisées en trois classes : archéologie, sculpture et peinture. La section d’archéologie renferme de curieux monumens de l’art du moyen âge, dont quelques-uns proviennent des anciennes églises. La section de sculpture comprend quarante-cinq bustes, bas-reliefs et statues, entre autres un très beau buste du régent par Coysevox, des bustes de Bosio, de Dantan aîné, de Préault, et diverses œuvres d’artistes picards, MM. Edmond Lévêque, de Forceville, Guérard et Caudron. La section de peinture est la plus riche de toutes, elle ne contient pas moins de 149 tableaux, où l’école italienne est représentée entre autres par l’Albane, Canaletto, Martinelli, Vivarino, Titien, — l’école hollandaise et flamande par Jordaens fils, Teniers le vieux, Otto van Veen, — l’école espagnole par Zurbaran, — la vieille école française par les peintres de la confrérie de Notre-Dame du Puy, Claude Lorrain, Jean Jouvenet, Coypel, Vanloo, — et l’école moderne par Watelet, Carle et Horace Vernet (Massacre des Mameluks), David (Portrait en pied de la comtesse de Dillon), Steuben, Girodet, Heim, Droling, Bellangé. De même que dans la galerie de sculpture, les artistes picards tiennent honorablement leur place à côté de ces maîtres : l’un de ces artistes, M. Rioult, est de Montdidier ; les deux autres, MM. Porion et Pierre Thuillier, l’habile paysagiste, sont d’Amiens.

On pourrait croire d’après cette énumération déjà bien longue pour une ville de province que nous en avons fini avec la peinture ; mais la mairie et l’école de dessin ont aussi leur musée. A part quelques toiles anciennes, telles que les dessus de portes de Boucher, qui sont cités parmi les meilleures œuvres de ce maître, la collection des tableaux de la mairie ne remonte pas au-delà de 1802, c’est-à-dire à l’année même où fut signée la paix d’Amiens. Le premier consul avait envoyé quelques belles toiles pour orner la salle des conférences ; le conseil municipal a jugé qu’elles étaient là tout aussi bien qu’à Paris, et les a gardées. Chaque fois que la mairie recevait une visite impériale ou royale, on avait bien soin de faire remarquer que dans les précédentes visites on avait reçu des tableaux ; or, comme Louis XVIII ou Charles X ne voulaient point se montrer moins généreux que Napoléon, et Louis-Philippe moins