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entraînant le sable et la vase du fond, accompagné d’un grand nombre de gerbes liquides presque aussi hautes. Les personnes assemblées sur le bord de la pointe éprouvèrent une violente commotion, et l’équipage du vaisseau le Louis XIV, qui était en mer à une distance de 900 mètres, reçut des secousses presque aussi fortes. Un navire quelconque qui se serait trouvé au-dessus de la torpille eût été certainement brisé et coulé.

En somme, la dynamite et le fulmi-coton sont jusqu’ici les deux préparations les plus commodes et les plus économiques parmi toutes les substances explosives, celles où la plus grande quantité de force vive sommeille dans le plus petit volume; mais chacune a des avantages et des inconvéniens qu’on ne retrouve point chez l’autre, et qui les distinguent toutes deux des poudres au salpêtre. Il est certain que pour déterminer la rupture de matériaux durs et résistans, là où un déploiement brusque d’énergie est nécessaire, la dynamite et le fulmi-coton ne peuvent être remplacés par rien. Qu’il s’agisse de faire sauter des roches très compactes, de briser des blocs de minerais très siliceux, de diviser d’énormes masses de fer, ces deux produits rendent et rendront de précieux services. La nitroglycérine est fort délétère et se congèle facilement, ce qui est très désavantageux, car en se congelant elle paraît acquérir une plus grande tendance à faire spontanément explosion; elle détone aussi beaucoup plus facilement que le fulmi-coton. M. Abel dit qu’une balle de fusil pénétrant dans une voiture chargée de dynamite déterminerait une explosion violente, tandis qu’elle ne donnerait lieu à rien de pareil en arrivant sur du fulmi-coton comprimé. En revanche, la dynamite résiste à l’eau pendant assez longtemps et peut être employée là où une autre substance explosive perdrait ses propriétés. De plus elle est plastique, c’est-à-dire qu’elle peut être introduite avec la plus grande facilité et en tout sens dans les trous de mines, de façon à combler tous les vides. Les cylindres rigides de fulmi-coton ne se prêtent point à une semblable opération; parfois même ils s’arrêtent dans les portions irrégulières ou trop étroites du trou : le mineur veut alors enfoncer la charge à grands coups, et il en résulte des explosions. Il est évident qu’avec une matière molle les accidens pendant le bourrage doivent être beaucoup plus rares.

Partout donc où une action très violente est requise, le fulmi-coton et la dynamite sont indiqués; mais il y a des circonstances où ces produits ne l’emportent pas sur la poudre ordinaire, si même ils l’égalent, sans parler de l’usage de la poudre comme force impulsive des projectiles. Pour briser le roc tendre, pour soulever la terre, pour déplacer des masses considérables, la poudre, à cause