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cialisme. Que cette taxe ait des inconvéniens, qu’elle ne repose pas sur une égalité absolue à cause de l’inexactitude des déclarations et du peu d’efficacité des moyens de contrôle, cela est possible; mais quel est l’impôt qui n’a pas d’inconvénient? Nous n’en connaissons aucun dans notre législation fiscale, et il y en a beaucoup qui en ont plus que l’impôt du revenu. D’ailleurs on pourrait, ainsi que cela existe en Angleterre et aux États-Unis, l’établir à titre provisoire, jusqu’à ce que des excédans de recette permissent de s’en passer, — et comme il aurait été la ressource des temps difficiles, on trouverait juste qu’il fût appelé le premier à profiter d’une situation meilleure. Ce qui nous paraît sûr, c’est qu’en le généralisant autant que possible et en faisant descendre assez bas la limite d’exemption, on obtiendrait aisément de cette façon, et avec un simple prélèvement de 2 pour 100, les 150 millions qui nous manquent. Or quelle est la personne qui, pour avoir le budget en équilibre, ne sacrifierait pas 2 pour 100 de son revenu? On le ferait d’autant plus volontiers qu’on n’aurait pas à payer sous une autre forme peut-être plus onéreuse ce qui serait demandé sous celle-ci. Enfin, qu’on adopte l’-impôt sur le revenu ou qu’on en prenne d’autres, il faut absolument arriver à l’équilibre du budget; c’est la première condition d’une bonne situation financière.

La seconde, avons-nous dit, est le maintien d’un amortissement sérieux; 200 millions sont aujourd’hui inscrits au budget pour le remboursement successif de la dette envers la Banque de France. C’est un amortissement important; on ne peut rien demander de plus, mais il faudra le maintenir après ce remboursement, ou tout au moins garder 150 millions. Le pourra-t-on? On a commis une grande faute en empruntant les 5 milliards destinés aux Prussiens; on aurait dû créer des annuités remboursables dans un délai plus ou moins court. De cette façon, l’amortissement devenait obligatoire, et il n’y avait plus à le discuter; on a préféré emprunter en rentes perpétuelles, et cet amortissement n’est plus que facultatif. Après le remboursement de la Banque de France, beaucoup de gens n’en voudront plus, et prétendront qu’il vaut mieux diminuer les impôts que de pourvoir au rachat d’une dette dont personne ne se préoccupe et qu’on supporte après tout assez aisément. Si ce langage vient à prévaloir, ce sera très fâcheux pour le crédit, car l’amortissement a l’avantage, non-seulement de diminuer la dette pour l’avenir, mais d’améliorer le crédit dans le présent. L’Amérique nous offre sous ce rapport un exemple remarquable; elle a comme nous une dette considérable, mais elle consacre chaque année une forte somme à la réduire. Il en résulte qu’elle trouve aujourd’hui à emprunter à 5 pour 100, lorsqu’il y a quelques années,