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entoure et jusqu’où elle pousse ses ramifications les plus éloignées, qui maintenant pénètrent toutes les rues, et peuvent entrer dans chacune de nos maisons. En outre tous les robinets par où l’eau s’échappe sont disposés de telle sorte qu’on peut y brancher les pompes à incendie. On s’occupe à présent de modifier la fermeture de certaines conduites importantes, afin qu’il soit possible en cas de sinistres d’y adapter des pompes à vapeur.

L’eau que Paris possède aujourd’hui n’est pas exclusivement employée au service des particuliers, on peut dire qu’il y a l’eau publique et l’eau privée ; mais l’une et l’autre ne coulent que dans l’intérêt de la population. Il faut non-seulement alimenter les besoins domestiques, il faut encore satisfaire dans de larges proportions aux exigences de la voirie d’où résulte la salubrité de la cité. Enfin il est bon que les villes aient des fontaines monumentales qui jettent la fraîcheur autour d’elles et plaisent aux yeux. Sous ce triple rapport, Paris n’est plus comparable à ce qu’il était jadis, et les efforts accomplis ne sont point restés stériles. Sur nos places, dans nos carrefours, au milieu de nos squares, dans tous les lieux de promenade, on a élevé des fontaines monumentales. Il en existe soixante et une aujourd’hui qui ne sont point irréprochables ; l’architecture semble ne s’être jamais occupée de créer des fontaines : si l’eau n’y coulait pas, ce ne serait le plus souvent qu’un édifice d’apparat orné de sculptures plus ou moins agréables, mais dont la destination ne se manifeste pas par l’agencement des lignes et la forme extérieure. Que ce soit un charmant profil antique comme la fontaine Gaillon, une médiocre copie en bronze d’un personnage de Raphaël comme la fontaine Saint-Michel, trois élégantes statues comme la fontaine de Grenelle, un Osiris porte-cruche comme la fontaine de la rue de Sèvres, que ce soit un immense plat monté semblable à ceux où les ménagères de province rangent leurs petits pots de crème, comme l’ancienne fontaine du Château-d’Eau,. — ce ne sont que des œuvres de hasard sans caractère spécial, et que laissent bien loin derrière : elles les admirables fontaines que construisit la Rome de la papautés Frognall Dibdin, dans son Voyage en France en 1818, admire surtout la gerbe d’eau du Palais-Royal ; il a raison ; , de toutes les fontaines de Paris, c’est encore la plus plaisante à voir et la plus logique. Paris fut longtemps menacé d’une fontaine dont heureusement, l’exécution a été abandonnée. On avait imaginé d’élever sur la place de la Bastille un éléphant en bronze haut de 50 pieds et qui aurait jeté de l’eau avec sa trompe dans le bassin qui devait lui servir de soubassement : je me rappelle avoir vu le modèle en plâtre au temps de mon enfance, c’était hideux. Lorsqu’on démolit ce colosse informe pour faire place à la