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Faisanderie, de Gravelle, qui ferment la presqu’île de Saint-Maur, et en arrière le réduit de Vincennes, — à l’ouest, le Mont-Valérien, puissant et solide, unique gardien de cette partie extérieure de la place, — au sud enfin, les forts d’Ivry, de Bicêtre, de Montrouge, de Vanves et d’Issy. Malheureusement ces fortifications, œuvre savante des plus habiles ingénieurs militaires, ont été faites dans les conditions d’un temps où l’artillerie de siège portait à 1,600 mètres, l’artillerie de campagne à 800 mètres, la mousqueterie à 300 ou 400 mètres. Aujourd’hui la révolution de l’artillerie a tout changé en donnant au canon une portée de 8,000 mètres, et Paris, même avec ses forts, peut se voir menacé par une série de hauteurs qui l’environnent, Ormesson, la butte Pinson au nord, Montretout à l’ouest, Avron à l’est, Châtillon au midi, surtout ce coteau de Châtillon, du haut duquel on dirait qu’il n’y a qu’à jeter de la main les obus dans la ville. De plus, les fortifications de Paris ont toujours offert des lacunes, des points vulnérables, bien connus des ingénieurs, si connus qu’ils étaient indiqués dans les cours de nos écoles militaires. Entre le Mont-Valérien et Saint-Denis, il y a une trouée de 12 kilomètres, couverte il est vrai par les replis de la Seine, de même que l’est, à l’extrémité opposée, se trouve gardé par les sinuosités de la Marne. Entre le Mont-Valérien et Issy, il y a un autre espace de près de 8 kilomètres, où se trouvent sans défense la percée de Sèvres, les hauteurs de Meudon. Malgré tout, Paris était certainement en mesure de faire face à l’orage, pourvu qu’on réparât le temps perdu au début de la guerre, à la condition qu’on se hâtât d’armer les forts et l’enceinte, d’approvisionner la ville, de fortifier les points faibles de la défense extérieure par des ouvrages complémentaires d’une nécessité démontrée.

C’était là une des premières préoccupations du ministère Palikao à son arrivée au pouvoir. En réalité, avant la fin d’août les plus sérieux efforts avaient été faits pour l’armement des forts et de l’enceinte. Le général de Chabaud-Latour, plus libre désormais, avait pu mettre la main à l’œuvre, poussant autant que possible les travaux dans la presqu’île de Gennevilliers, sur les hauteurs de Montretout, Meudon, à Châtillon, aux Hautes-Bruyères, sur le plateau de Villejuif. Il était arrivé, non sans de grands efforts, à réunir plus de 12,000 ouvriers, employés à construire les nouvelles redoutes. Le gouvernement avait surtout fait deux choses des plus utiles. Il avait d’abord largement préparé, et on peut même dire assuré l’approvisionnement de Paris pour soixante jours par l’action directe de l’état, sans compter les réserves de la boulangerie, les approvisionnemens du commerce et des particuliers. Le parc de bestiaux qui a suffi si longtemps aux besoins du siège était déjà