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propriétaires de l’île, M. José do Canto, tout jeune encore, comprit l’importance des reboisemens au point de vue économique, et entreprit de couvrir de plus maritimes et d’autres essences exotiques les solitudes incultes qui faisaient partie de ses vastes domaines. Il y a trente ans que cet homme énergique poursuit la tâche laborieuse à laquelle il s’est voué. Le succès couronne de plus en plus ses efforts. Son nom, béni de ses concitoyens, restera dans leur mémoire comme celui d’un bienfaiteur public, car chaque jour son exemple trouve de nouveaux imitateurs, et déjà chacun peut apprécier l’immense source de travail et de richesse dont il a doté son pays. Son frère M. Ernest do Canto, M. Jaccome, M. Borges et plusieurs des autres propriétaires de l’île, rivalisent aujourd’hui avec lui de science et d’ardeur dans les applications pratiques de la botanique. Aux essais forestiers, tous ont joint la création de jardins splendides où sont réunis des spécimens innombrables de plantes de toutes les parties du globe. Frappé des heureuses conditions climatériques des Açores, M. José do Canto avait commencé son œuvre avec l’idée de faire de San-Miguel un vaste jardin d’acclimatation botanique. Son projet, mis en pratique par lui et ses émules, est déjà devenu une magnifique réalité. Avant d’insister davantage sur les résultats qu’ils ont obtenus, je veux essayer de donner un aperçu rapide de la flore indigène du pays. La pauvreté de cette flore primitive mettra encore mieux en lumière l’importance des acquisitions végétales dont le pays s’est enrichi.


II

Les plantes indigènes de l’archipel açorien appartiennent à 478 espèces, comprises dans 80 familles différentes. Elles sont assez bien connues, grâce aux travaux de collectionnement ou de détermination dus à Hochstetter, Seubert, Watson, Hunt, Drouet, Morelet, Hartung et Godman. Si l’on considère la position des Açores au milieu de l’Atlantique, presque à égale distance de l’Europe et de l’Amérique, mais très loin des deux continens, on s’attend à y observer tout un ensemble de végétaux très différens de ceux, des côtes de l’Amérique et de l’Europe. On peut penser aussi que le partage des espèces communes, s’il en existe, doit être à peu près égal entre l’ancien et le nouveau continent, la direction des courans marins de l’ouest vers l’est compensant la faible différence des distances qui séparent les Açores des deux rives de l’Atlantique. Il n’en est rien pourtant. Sur les 478 espèces qui composent la flore açorienne, 40 au plus sont spéciales à cet archipel, 400 se retrouvent en Europe, principalement dans la région