Page:Revue des Deux Mondes - 1873 - tome 104.djvu/839

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’emploi d’un instrument tranchant. L’orange allongée (comprida) est plus aromatique que la précédente et plus acide, surtout pendant les premiers mois de l’hiver ; l’arbre qui la donne est rarement très chargé de fruits. On désigne sous le nom d’orange d’argent (prata) une variété plus petite dont la chair est très ferme, la peau extrêmement fine et la couleur d’un jaune-verdâtre clair. L’orange choisie (selecta) est grosse, d’un goût excellent, très peu acide ; la peau en est de couleur, jaune foncé. Elle est dépourvue de pépins et ne mûrit guère qu’en avril, ce qui lui donne une grande valeur. L’orange à ombilic (d’embigo) est aplatie et très douce ; c’est la variété qui fournit les fruits les plus volumineux. Vient enfin la mandarine (tangerina), qui m’a paru différer de la mandarine de Malte par une adhérence plus marquée de l’écorce à la partie charnue. Cette union plus intime de la zone corticale du fruit à la masse des lobes intérieurs semble distinguer toutes les oranges des Açores des variétés correspondantes d’Espagne et d’Italie.

L’orange entre en maturité à la fin d’octobre ; ce n’est toutefois qu’en janvier que se recueillent les meilleures qualités. La saison se termine en mai. La multiplication de l’oranger s’opère par marcottes ou par boutures. Le premier procédé a été emprunté aux Chinois : il est fort en usage depuis quelques années. On choisit une branche de 4 à 5 centimètres de diamètre, à laquelle on pratique une incision circulaire. Autour de la plaie, on dispose un paillasson en forme d’entonnoir évasé par le haut et rempli de terre battue. L’opération se fait du 15 mai au 15 juin ; les racines adventives ne tardent pas à pousser, et dès l’hiver suivant la bouture est pourvue de racines suffisantes pour pouvoir être détachée de la plante-mère. La jeune plante ainsi obtenue rapporte souvent du fruit au bout de deux ou trois ans. Dans l’origine, on employait exclusivement la multiplication par greffe sur des sujets obtenus par semis. Aujourd’hui cette méthode est encore usitée en concurrence avec la précédente ; cependant elle est un peu délaissée à cause de la lenteur relative avec laquelle les arbres qui en proviennent entrent en rapport. On assure néanmoins que les sujets auxquels elle a été appliquée donnent de meilleurs fruits et durent plus longtemps que les autres.

L’orange douce se reproduit aussi de graine. C’est là un fait digne de réflexion, car il y a des botanistes qui considèrent l’oranger à fruit doux comme une simple variété de l’oranger épineux à fruit amer. Si cette hypothèse était vraie, quand on sème un pépin d’orange douce, on devrait s’attendre à voir naître, conformément à la loi générale, un individu appartenant au type primitif. Or, au moins aux Açores, les choses ne se passent pas ainsi. Le sujet qui