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erreur. Cependant quelques médecins et beaucoup de personnes étrangères à la science doutent encore assez de la certitude de ces signes pour souhaiter que la physiologie en découvre d’autres d’un caractère plus sûr. Un zélé philanthrope a fondé tout dernièrement un prix de vingt mille francs à décerner à l’auteur de la découverte d’un signe infaillible de la mort. Certes l’intention est excellente, mais on peut dès maintenant considérer sans effroi l’ouvrage du fossoyeur : les signes actuellement connus sont suffisans à prévenir toute erreur et à rendre impossible le danger sinistre d’une inhumation prématurée.

Il faut distinguer d’abord les signes immédiats de la mort. Le premier et le plus décisif est l’interruption définitive des battemens du cœur, constatée pendant cinq minutes au moins, non pas avec la main, mais avec l’oreille. « La mort est certaine, — dit le rapporteur de la commission nommée en 1848 par l’Académie des Sciences pour juger le concours relatif aux signes de la mort réelle, — la mort est certaine lorsqu’on a constaté chez l’homme la cessation définitive des battemens du cœur, laquelle est immédiatement suivie, lorsqu’elle n’en a pas été précédée, de la cessation de la respiration et de celle des fonctions du sentiment et du mouvement. » Les signes éloignés ne sont pas moins dignes d’attention. On en considère trois : la rigidité cadavérique, la résistance à l’action des courans galvaniques et la putréfaction. Comme nous l’avons vu, la rigidité cadavérique ne commence que quelques heures après la mort, l’abolition générale et totale de la contractilité musculaire, sous l’influence des courans et enfin la putréfaction ne sont manifestes qu’à une époque encore plus tardive. Ces signes éloignés, et surtout le dernier, ont l’avantage de pouvoir être constatés par des personnes étrangères à l’art, et on fait bien d’y prendre garde dans les pays où la vérification du décès n’est pas confiée aux médecins, mais ils n’ont plus d’importance partout où il y a des médecins pour ausculter le cœur et conclure la mort, avec certitude et promptitude, de la cessation absolue des battemens de cet organe. Au commencement de ce siècle, Hufeland et plusieurs autres praticiens, convaincus que tous les signes alors connus de la mort étaient incertains, sauf la putréfaction, avaient proposé et obtenu en Allemagne la création d’un certain nombre de maisons mortuaires destinées à recevoir et à conserver quelque temps les corps des décédés. Depuis que ces établissemens existent, on n’a vu aucun des corps transportés dans ces asiles, après la déclaration authentique du médecin, revenir à la vie. L’utilité des maisons mortuaires est encore plus contestable aujourd’hui où l’on possède un moyen positif et immédiat de reconnaître la mort réelle. Les mesures de police qui interdisent les