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des traités. Avant son départ de Paris, Iwakoura a eu encore une conférence avec notre ministre des affaires étrangères ; il en a profité pour indiquer le caractère général des transformations opérées dans l’empire japonais et pour insister sur les sentimens d’amitié que cet empire professe à l’égard de la France. On ajoute que M. de Rémusat de son côté a développé les considérations qui doivent décider le gouvernement du mikado à s’inspirer, en matière religieuse, des principes de tolérance et d’équité.

L’ambassade extraordinaire a quitté Paris ; mais il y reste une légation permanente dirigée par un ministre plénipotentiaire, M. Samejima (les fonctionnaires japonais prennent maintenant le nom de monsieur). Les diplomates qui font partie de cette mission parlent correctement le français ; ils portent les mêmes vêtemens que les Européens, et on les a vus s’assimiler aisément tous les usages en vigueur dans le corps diplomatique. La légation de Japon ne pourra pas manquer de se convaincre des intentions loyales et des sentimens amicaux d’un peuple qui désire sincèrement la prospérité de ce lointain pays.

Sans aucun doute les Japonais ont de l’avenir. Braves, intelligens, actifs, poussant le point d’honneur jusqu’à l’exagération, à la fois mercantiles et chevaleresques, hommes du moyen âge et hommes modernes, entreprenans, hardis, curieux de nouveautés, très habiles à s’approprier les découvertes de la science, observateurs et voyageurs, pratiques dans leurs idées, patiens dans leurs études, ils pourront, d’un moment à l’autre, exercer une sérieuse influence dans l’extrême Orient. Défendus par la mer, ils dominent tout l’est du continent asiatique. Leurs troupes mises sous le commandement d’officiers français distingués s’aguerrissent et se perfectionnent chaque jour. Leurs navires cuirassés, leurs chemins de fer, leurs lignes télégraphiques se multiplieront rapidement. En communication directe avec Marseille par les paquebots des Messageries nationales, avec San-Francisco par la nouvelle ligne des paquebots américains, le Japon voit s’ouvrir devant lui de larges perspectives. Grâce à la douceur de son climat, à sa position insulaire, à la richesse de son sol, à ses aptitudes industrielles, il peut imprimer un remarquable essor à ses transactions commerciales. Le temps n’est peut-être pas éloigné où il échangera ses produits non-seulement avec ceux des États-Unis et de l’Europe, mais encore avec ceux des différentes contrées de l’Asie, de l’Océanie et de l’Afrique. On trouve en grande quantité au Japon du thé, du coton, de la soie, du cuivre, du fer, de la houille, du camphre, du salpêtre, de la porcelaine, du papier, de la laque, du tabac. L’industrie et l’agriculture y sont en progrès. Le commerce international y est assuré d’un accroissement considérable.