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I

C’est aux États-Unis que revient l’honneur d’avoir ouvert le Japon aux étrangers. Jusqu’en 1853, époque à laquelle parut devant les côtes japonaises l’escadre du commodore Perry, nous ne connaissions ce lointain empire que par les récits des Hollandais enfermés dans l’îlot de Décima, où ils avaient obtenu le droit exclusif de commerce. Toutes les transactions s’effectuaient par l’intermédiaire des autorités indigènes et à travers une série de formalités, de restrictions qui les rendaient aussi difficiles qu’onéreuses ; la Revue a exposé le détail des négociations qui amenèrent en 1858[1] l’ouverture des ports de Kanagawa, de Hakodadé et de Nagasaki. Les traités signés par M. Harris au nom, des États-Unis, par le comte Poutiatine, par lord Elgin et par le baron Gros au nom de la Russie, de l’Angleterre et de la France, furent le point de départ d’une période nouvelle. Ce sont les conventions qui régissent encore nos rapports avec le gouvernement japonais ; elles doivent être l’objet d’une prochaine révision qui sera faite à Yeddo, mais dont l’ambassade extraordinaire envoyée par le mikado en Europe prépare en ce moment même les bases principales. Faculté d’entretenir des missions diplomatiques à Yeddo et des consulats dans les ports ouverts aux étrangers, reconnaissance de la juridiction consulaire, permission de faire les achats et ventes directement avec les Japonais sans l’intervention du gouvernement, admission des monnaies étrangères, droit pour les agens diplomatiques et consuls généraux de voyager librement dans tout le territoire de l’empire japonais, telles étaient les clauses principales des traités de 1558. Ils ouvraient immédiatement les ports de Kanagawa, de Hakodadé et de Nagasaki, et stipulaient pour les étrangers l’autorisation de résider à Yeddo à partir du 1er janvier 1862, et à Osaka à partir du 1er janvier 1863. On se rappelle les difficultés de tout genre que rencontra la mise en vigueur de ces traités, l’hostilité dont firent preuve contre les étrangers tantôt le mikado, tantôt le taïcoun, tantôt les daïmios, les assassinats commis sur divers étrangers, le pillage de la légation anglaise de Yeddo en 1863. — On se souvient des actes de vigueur auxquels les puissances signataires des traités de 1858 se crurent obligées de recourir, le bombardement de Kagosima par l’amiral anglais Kuper et la brillante expédition navale dirigée en 1864 contre le prince de Nagato par l’escadre combinée de l’Angleterre, de la France et des Pays-Bas. La prise des forts de Simonoseki dissuada le Japon de l’idée d’une plus longue résistance.

  1. Voyez l’Annuaire de 1858-1859.