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recommandaient au choix des Allemands, si respectueux pour le sang du grand empereur envers lequel ses descendans avaient eu si peu de respect eux-mêmes ; mais chacune avait des titres particuliers aux yeux des peuples dont ils étaient les candidats. La maison de Saxe descendait aussi par les femmes de Wittikind, l’indomptable champion de l’indépendance saxonne. Elle avait hérité en partie des grands biens que Charlemagne avait abandonnés à ce dernier après sa soumission, et la Saxe, qui comprenait alors presque tout le nord de l’Allemagne, leur était profondément dévouée. La maison conradinique ou de Franconie avait élevé et maintenu la haute estime dont jouissaient les Francs orientaux, qui avaient été l’appui principal de la royauté de Germanie créée par le traité de Verdun, et récemment elle avait frappé l’imagination allemande par sa lutte à toute outrance contre la maison célèbre de Bamberg, dont elle avait triomphé et qu’elle avait obligée de transporter bien loin sa demeure et sa destinée, sur la marche orientale (OEsterreich) où elle a fondé la première maison d’Autriche. L’origine de cette maison, appelée conradinique parce que presque tous ses premiers membres s’appelèrent Conrad, se perdait dans la nuit des temps, mais son siège principal avait été le comté de Worms et pays avoisinans. Le Nassau est un débris de ce patrimoine primitif. Les Francs orientaux, parmi lesquels se confondirent les Thuringes, et les Saxons devenus chrétiens civilisés étaient alors les peuples prédominans en Germanie. Les autres nations, comme elles s’appelaient elles-mêmes, telles que les Lorrains, les Bavarois, les Allemani, n’étaient point en mesure de disputer la prépondérance aux deux premières.

La maison de Saxe avait alors pour chef le duc Otton, dit l’Illustre, gendre de l’empereur Arnoul, vieillard magnanime qui, craignant pour l’Allemagne des divisions fatales, si l’élection était emportée de haute lutte par l’un des compétiteurs, donna l’exemple de la générosité, et conseilla aux Saxons de laisser passer un Franconien à cette prendre épreuve de l’éligibilité du trône. — Sur les conseils et l’impulsion du vénéré duc de Saxe fut donc élu Conrad Ier, dit de Fritzlar, duc de la France rhénane, lequel a inauguré le système électoral qui fut pendant plus de neuf cents ans la loi de l’empire germanique. A la mort de Conrad Ier, fidèles à l’engagement d’honneur qu’il avait contracté, les Francs orientaux portèrent leurs suffrages sur Henri, appelé l’Oiseleur, duc de Saxe, fils d’Otton l’Illustre et père de l’empereur Otton le Grand ; mais, malgré cet échange de procédés et de générosité, les deux peuples et les deux maisons restèrent en froideur. La possession de plusieurs duchés avait paru à la maison de Franconie une compensation incomplète de ce qu’elle avait perdu, et des relations peu affectueuses s’étaient