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guerre. Il permet, sans mentir, de placer en dehors du budget ordinaire des dépenses indispensables, mais qui ne peuvent se reproduire, telles que la reconstitution de notre matériel de guerre, la construction d’une ligne déplaces fortes pour avoir des frontières, la restauration de certains de nos grands monumens à Paris détruits par la commune, l’entretien des troupes allemandes, l’indemnité pour les dépenses des mobilisés. Tels sont les motifs du compte de liquidation, qui s’élève déjà à 748 millions. Quelles sont les ressources ? Les annulations de crédit, les terrains à vendre dans Paris, les boni sur les frais de l’emprunt, une amélioration certaine dans les produits des impôts nouveaux. Ces ressources s’élèvent à 644 millions environ, et il n’y faut pas toucher sous peine de rouvrir le grand-livre.

Passant de là aux réclamations respectives de Paris et des départemens, M. Thiers n’hésite pas au sujet de Paris ; il lui paraît impossible de réduire l’allocation stipulée en sa faveur. La ville de Paris a payé pour la France, sa résistance a honoré la France entière ; il y a là une dette sacrée qu’il faut savoir acquitter. Le besoin est d’ailleurs pressant ; son budget est à bout de ressources. Quant aux départemens, leurs droits doivent être respectés, mais il faut qu’ils modèrent leurs prétentions, et que la même modération soit gardée par ceux qui les défendent ; il faut en outre qu’on imagine pour eux une combinaison qui ne charge pas à nouveau le compte de liquidation, sauvegarde de notre crédit. « Songez donc, messieurs, a ajouté M. Thiers en finissant, qu’avec 100 millions nous pouvons refaire nos frontières. » A son tour, le ministre des finances a justifié le projet relatif à la ville de Paris et la transaction qui est intervenue entre le gouvernement et le conseil municipal. Ce dernier a consenti d’emblée et spontanément à tous les sacrifices qu’il était possible de faire : les charges de la ville et les engagemens qu’elle a souscrits ne lui permettent pas d’aller au-delà. Sur ces deux communications, la commission du budget a ouvert un débat auquel ont pris part plusieurs de ses membres : quelques-uns ont appuyé Paris, mais il était évident que la province était on force, si bien qu’à un moment donné le président de la république se crut obligé de calmer ce flot de prétentions. « Je ne demande qu’à m’entendre, dit-il, mais il convient d’être modéré. Examinez avec soin, et ne faites que ce qui est juste. En défendant les finances de l’état, j’accomplis un devoir souvent pénible, mais je dois l’accomplir. » Enfin on va aux voix, et la commission décide ; 1° que le principe des indemnités de la ville de Paris et de l’état ne sera pas séparé, 2° que, dans le cas où l’indemnité de la ville de Paris serait diminuée, celle des départemens serait aussi diminuée proportionnellement, 3° que le gouvernement