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l’extrême ressemblance des plumes avortées des manchots avec des écailles de reptiles. Ajoutons que, parmi les reptiles, le dragon volant est soutenu par un parachute semblable à celui des écureuils et des phalangers volans. Ainsi donc, s’il est impossible, dans l’état actuel de nos connaissances, de démontrer comment l’air a pu modifier si profondément l’organisme des oiseaux, on voit poindre déjà les premiers indices lui permettront de le faire sans s’appuyer sur une adaptation préconçue de l’organe a la fonction qu’il remplit.

La lumière est indispensable aux végétaux, Sous l’influence de cet agent, la matière verte se forme, l’acide carbonique de l’air est décomposé, et le carbone, base du tissu végétal, est fixé. A l’obscurité, la plante languit, s’étiole, les entre-nœuds s’allongent, les feuilles se développent à peine, les fleurs et les fruits avortent, les mouvemens tels que ceux des feuilles de la sensitive sont abolis : aussi, quelques plantes parasites exceptées, la lumière est-elle une condition nécessaire de la vie végétale. Certaines fleurs ne s’épanouissent que sous l’action d’une lumière très vive ; telles sont celles du nelumbium de l’Inde et des bougainvillœa Brésil. Vainement on leur prodigue la chaleur dans les serres du nord de l’Europe ; elles ne fleurissent pas ou fleurissent mal, tandis que déjà dans le midi de la France, en Provence et en Languedoc, ces plantes se couvrent de fleurs tous les ans malgré une température plus basse et moins égale que celle des serres d’Angleterre ou de Hollande. Toutes les plantes sans exception cherchent la lumière ; placées dans une chambre éclairée, elles se dirigent vers les fenêtres, dans une cave obscure vers le soupirail.

La lumière est moins indispensable aux animaux : leur respiration en est indépendante, tous peuvent vivre dans une demi-obscurité, et beaucoup dans une obscurité totale ; leurs fonctions s’accomplissent, ils vivent et se reproduisent, seulement leur peau, leur sang et leurs tissus ne se colorent pas, ils s’étiolent comme ceux des plantes. Tous les animaux du nord ont des couleurs mates, sauf le blanc, qui est quelquefois très pur, surtout en hiver. Ce sont toujours les parties exposées à la lumière qui sont le mieux colorées, le dos et les flancs dans les mammifères, les oiseaux, les reptiles et les poissons. Dans les coquilles, le contraste est encore plus frappant ; celles qui vivent dans la vase ou dans la mer à de grandes profondeurs ont les couleurs ternes et uniformes.

Liée intimement à l’organe de la vue, sans lequel les animaux n’en auraient pas la perception, la lumière exerce sur cet organe une action puissante. Dans l’obscurité, les yeux des animaux s’atrophient ; à la lumière, ils se perfectionnent et s’améliorent par l’exercice. Les aigles, les vautours, les faucons, voient à des distances énormes ; c’est la vue et non l’odorat qui leur signale une proie éloignée. La direction