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pas constans, car chez les oiseaux on remarque une disposition précisément inverse : les cellules motrices y sort triangulaires et les cellules sensitives quadrangulaires. On voit donc que ces formes ont en réalité peu d’importance, et que l’on ne peut déduire ici la fonction de la structure : cela est évident. Mais d’une part la forme géométrique ne doit pas être confondue avec la disposition mécanique, de l’autre la structure elle-même doit être distinguée du fait de l’appropriation. Ainsi, quelle que soit la signification de la figure des cellules nerveuses, et n’eût-elle aucun rapport avec une fonction donnée, toujours est-il que les nerfs doivent avoir, une disposition telle qu’ils mettent en communication le centre avec les organes, et par ceux-ci avec le milieu externe : cette disposition de convergence et de divergence des parties au centre et du centre aux parties a donc un rapport évident avec la sensibilité et la locomotion, lesquelles en ont un non moins évident avec la conservation de l’animal. De plus, lors même que la structure elle-même n’a aucune signification, le fait de l’appropriation ne subsiste pas moins. Par exemple, je ne sais si la structure des glandes salivaires et celle des glandes mammaires ont un rapport quelconque avec les sécrétions spéciales opérées dans ces deux sortes d’organes ; cependant n’y eût-il rien de semblable, le fait de la sécrétion salivaire n’en est pas moins dans un remarquable rapport d’appropriation et d’accord avec la fonction nutritive, et la sécrétion du lait, laquelle ne s’opère qu’au moment où elle est utile et par une heureuse coïncidence avec l’acte de la parturition, n’en présente pas moins l’appropriation la plus frappante et l’accord le plus saisissant avec le résultat final, qui est la conservation du petit.

Ce n’est pas du reste au hasard que la substance organisée passe de ce premier état homogène, amorphe, indéterminé, qui paraît en être le début, à cet état de complication savante où elle se manifeste dans les animaux supérieurs ; c’est suivant une loi, la loi du perfectionnement progressif des fonctions en raison de la différentiation progressive des organes. C’est cette loi que M. Milne Edwards appelle ingénieusement loi de la division du travail[1], et dont il a fait remarquer la haute importance dans le développement progressif de l’animalité. Par l’expression même de cette heureuse formule, on voit à quel point il est difficile à la science d’échapper à cette comparaison du travail humain et du travail de la nature, tant il est évident que ces deux sortes de travail ne sont que les degrés d’un seul et même fait. Cette loi constitue une ressemblance de plus entre les deux industries. Dans l’humanité en effet, tous les

  1. Introduction de zoologie générale, chap. III.