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vieil hôpital, qu’on devrait construire un institut pour les sciences naturelles et physiologiques qui n’aurait point de rival au monde ; les collections, les ménageries, les serres, les cultures du Muséum trouveraient enfin l’espace qui leur manque ; l’École de médecine pourrait avoir l’ampleur qui est nécessaire à ses amphithéâtres, à sa bibliothèque, à ses musées, à ses pavillons de dissection, à ses laboratoires de chimie, de physique, de pathologie, même à ses cliniques, qui, au lieu d’être comme aujourd’hui une sorte d’infirmerie banale, devraient réunir, pour l’instruction des étudians, tous les cas curieux et particuliers disséminés dans nos différens hôpitaux. On créerait là facilement une sorte de cité scientifique[1] où les élèves trouveraient tous les élémens qui rendent l’enseignement fécond et le travail attrayant. On verrait alors quel beau développement nous prendrions, et comme promptement nous ressaisirions ce rôle d’initiateurs, qui a été le nôtre pendant si longtemps, car ce ne sont ni l’esprit d’invention, ni les hommes, ni le bon vouloir qui nous ont manqué, ce sont tout simplement les ressources matérielles. Parfois on a pu croire que nous allions enfin nous élancer sur cette voie où d’autres nous précèdent aujourd’hui, mais nous nous arrêtions tout à coup sans cause apparente. Il en a été de cela comme de la reconstruction de la Sorbonne, qui avait été décidée ; solennellement en 1855 on posa la première pierre, la première pierre attend toujours la seconde.

L’exemple nous a été donné par nos adversaires eux-mêmes ; il faut savoir le suivre, et leur disputer, au grand bénéfice de l’esprit humain, une supériorité que nous saurons peut-être leur ravir. Le 5 juin 1868, M. Duruy, alors ministre de l’instruction publique, chargea M. Wurtz, membre de l’Académie des Sciences et doyen de la Faculté de médecine, d’aller étudier les établissemens scientifiques des principales universités allemandes. Le rapport de l’éminent professeur fut publié en 1870[2]. Il nous montre ce que nous avons à faire. Partout dans l’Allemagne du sud, comme dans l’Allemagne du nord., chez les catholiques et chez les protestans, il trouve la science à l’œuvre, poursuivant les recherches dont le champ est illimité, ne descendant pas des hauteurs abstraites où elle doit toujours planer, honorée par les gouvernemens, qu’elle honore, encouragée par eux et mise en état de ne pas rester une stérile spéculation de l’esprit. A Heidelberg, à Munich, à Berlin, à

  1. La valeur considérable des terrains occupés par l’École de médecine, l’École pratique et les Cliniques, arriverait naturellement en défalcation d’une partie des dépenses nécessitées par les reconstructions que nous proposons.
  2. Les Hautes études pratiques dans les universités allemandes, par Adolphe Wurtz ; Paris 1870.