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Saint-Vincent de Paul. Elles n’ont pas d’autre coquetterie, mais elles savent la pousser jusqu’aux extrêmes limites du possible ; la classe est moins morose, les cuivres reluisent, des rideaux éclatans de blancheur tombent le long des fenêtres, chaque encrier est entouré d’une rondelle de drap qui épargne bien des taches au pupitre, et contre la muraille, à la place d’honneur, s’élève une statuette de la Vierge environnée de fleurs en clinquant. Elles sont charmantes avec les enfans, ces saintes filles, et s’en font adorer, ce qui rend le travail de la classe singulièrement facile ; alertes, fort jeunes pour la plupart, assez fières de la bonne tenue des salles, elles vont et viennent à travers les bancs avec une prestesse élégante que leur gros vêtement de laine n’alourdit pas, donnant un conseil, corrigeant une faute, très gaies, toujours souriantes et fort occupées de leur jeune troupeau. Dans une de ces maisons, j’ai été reçu par la supérieure ; j’ai vu une femme d’une cinquantaine d’années, de façons exquises, aux traits fins, aux yeux spirituels et doux. Je l’ai regardée, et j’ai reconnu une personne que j’avais rencontrée jeune fille dans le monde au temps de ma jeunesse. Son entrée dans les ordres avait fait un certain bruit jadis ; elle s’est consacrée au dur labeur de soigner les malades, de secourir les pauvres, d’élever les enfans. Il y a dans la pâleur profonde de son visage et dans son sérieux sourire la sérénité d’une âme appuyée sur des réalités inébranlables ; sous l’humble cornette et sous la robe de bure de la religieuse, elle cache un grand nom et un cœur que la charité dévore. Je me suis éloigné sans lui laisser soupçonner que je l’avais reconnue ; ai-je besoin de dire que son école mérite d’être citée comme modèle ?

Le personnel enseignant employé dans les établissemens communaux de Paris ne mérite que des éloges : il y a bien par-ci par-là quelque directrice qui ne serait pas fâchée de laisser entrevoir qu’elle descend directement des Mérovingiens, ou quelque directeur qui n’a d’autres moyens de discipline que « la majesté du regard, » — le mot m’a été dit ; — mais ce sont là des défauts qui n’altèrent en rien la qualité réelle, le dévoûment sans relâche dont les instituteurs et les institutrices font preuve à tous les degrés. Si les maîtres sont bons, si pour la plupart les écoliers sont attentifs, si l’enseignement est très bien combiné et habilement donné, que manque-t-il donc à beaucoup de nos écoles pour être parfaites ? Il leur manque tout simplement d’être appropriées à l’objet en vertu duquel elles ont été créées, — il leur manque d’être des écoles. Celles qui ont été construites exprès dans les quartiers nouvellement annexés, ou dans ceux qu’on a vivifiés en y traçant de larges voies de communication, sont excellentes. Elles ont été bâties en