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XVIIIe siècle l’ancienne confédération germanique notait représentée que par 6 associés étrangers ; dans le siècle présent, elle en compte 17. D’une manière générale, ce sont les petits pays qui relativement ont été les plus féconds, et parmi eux la Suisse protestante a toujours été au premier rang : elle le doit principalement aux descendans des réfugiés français qu’elle avait accueillis après les persécutions religieuses du XVIe siècle et la révocation de l’édit de Nantes, qui en a été le complément. Demandons encore à la statistique quel rôle notre pays a joué dans les sciences, en comptant le nombre de nos compatriotes qui ont été membres étrangers de la Société royale de Londres. De 1750 à 1830, le nombre des savans français est descendu de 34 à 18 ; cependant nous étions toujours en tête de la liste ; mais aujourd’hui il y a 22 Allemands et 16 Français. L’académie de Berlin au contraire compte aujourd’hui parmi ses associés plus de Français que de savans d’autres nations : leur nombre était de 18 en 1750, il est aujourd’hui de 25, D’après ces deux statistiques, il est consolant dépenser que nous avons-gardé notre rang ; mais nous sommes stationnantes, tandis que l’Allemagne a progressé. Rien ne saurait donner une idée plus favorable de l’intelligence propre à notre nation ; pourtant c’est un avertissement sérieux pour les savans français et pour ceux dont le devoir est de seconder leurs travaux. Quand on voit combien peu les gouvernemens qui se sont succédé en France depuis le commencement du siècle se sont préoccupés du progrès scientifique, on est en droit d’affirmer que les efforts individuels ont tout fait. Sans être taxé de partialité, il est permis de dire que la restauration n’était guère favorable à la science ; la monarchie de Louis-Philippe fut bienveillante, mais inerte ; le second empire indifférent et secrètement hostile. Espérons que la troisième république imitera son aînée, qui au milieu des plus terribles convulsions a fondé des institutions qui durent encore.

Nous ne saurions suivre M. de Candolle dans la discussion approfondie à laquelle il soumet les causes et les influences qui dans chaque pays ont favorisé ou arrêté l’évolution des sciences physiques et naturelles. Il dresse même une liste de ces conditions, résultat final de ses études statistiques. J’ose en recommander la lecture au ministre de l’instruction publique et à ses conseillers. S’il n’est pas en son pouvoir de les réaliser toutes, il en est qui dépendent directement ou indirectement de lui ; ce sont : 1° une instruction primaire et surtout moyenne et supérieure bien organisée, indépendante des partis politiques ou religieux, tendant à provoquer les recherches et à favoriser les jeunes gens et les professeurs dévoués à la science, — 2° des moyens matériels abondans et bien organisés pour les divers travaux scientifiqnes, — bibliothèques, observatoires, laboratoires, collections, — 3° la liberté d’énoncer et de publier toute opinion au moins sur des sujets scientifiques sans éprouver des inconvéniens d’une certaine gravité, — 4° l’emploi