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peuples et des rois. L’objet du gouvernement, ajoute-t-il, est la déclaration du droit et l’organisation de la justice parmi les hommes. Or le droit et la justice ne sont que des applications de la morale. Le laïque est-il incompétent en fait de morale, il l’est nécessairement aussi en fait de droit, et il ne lui appartient pas de diriger la société, qui doit marcher vers la réalisation de la justice, ou qui tout au moins doit la faire respecter. »

Ainsi, ou il faut restaurer le système théocratique dans toute sa rigueur et introniser la toute-puissance ecclésiastique sur la ruine de la raison humaine, ou bien il faut admettre que l’instituteur laïque peut enseigner la morale sans se soumettre au contrôle de l’église. Il semblera à plus d’un lecteur que M. de Laveleye a rendu trop tranchée l’opposition des deux systèmes, qu’entre ces extrêmes il y avait place pour bien des situations intermédiaires et que la vérité était dans le juste milieu. Mais en fait de doctrines, les formules doivent être claires et nettes, sinon elles perdent toute signification, et surtout elles cessent d’être un appui solide dans la pratique. Du reste, les argumens les plus importans, les plus sérieux, les plus irréfutables de M. de Laveleye, ce sont les faits qu’il cite, et sous ce rapport il est d’une fécondité inépuisable. La Hollande et les États-Unis, deux contrées libres, religieuses, et où pourtant la loi interdit l’enseignement du dogme dans l’école primaire, lui en fournissent d’abondantes moissons ; il trouve des faits jusqu’en Belgique, le pays par excellence de l’ultramontanisme.

Telles sont les opinions de M. de Laveleye sur quelques-uns des points qui préoccupent en ce moment les esprits. La seconde partie du livre est consacrée à un exposé de la législation et de la statistique de l’instruction primaire dans tous les états de l’Europe et de l’Amérique, et même de l’Asie, de l’Afrique et de l’Australie. Les renseignemens puisés aux sources officielles sont accompagnés de réflexions et au besoin d’explications. Cette seconde partie sera fort appréciée, même par ceux qui ne partagent pas les opinions théoriques de l’auteur. Il est à désirer que les grandes questions trouvent ainsi des hommes d’études qui en préparent la discussion et mettent aux mains du public tous les documens qui s’y rapportent.


M. B.



Études sur l’aménagement des forêts, par M. Tassy ; Paris.


On sait que l’aménagement d’une forêt consiste à en régler l’exploitation de telle sorte qu’elle fournisse un revenu annuel aussi régulier et aussi avantageux que possible. Il importe aujourd’hui plus que jamais de ne rien oublier en vue d’améliorer la situation et d’augmenter le rendement de ce genre de propriété. D’abord il ne nous est pas permis