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Du déchaînement bruyant des partis, de cette agitation plus apparente que réelle pour la dissolution immédiate de l’assemblée, de ces conflits menaçans entre les fractions conservatrices de la chambre et le gouvernement, que reste-t-il aujourd’hui ? Assurément tout n’est pas fini, toutes les difficultés ne sont pas résolues, tous les orages ne sont pas dissipés, ils renaîtront peut-être encore, d’autres querelles qu’on ne prévoit pas pourront s’élever. En attendant, on est revenu au calme et à la trêve par une appréciation plus juste des choses. Le discours de M. Dufaure, appuyé par une certaine vigilance administrative, a jeté la confusion dans le camp dissolutioniste ; les divergences qui pouvaient se manifester dans la commission des trente et aboutir à des déchiremens nouveaux, ces divergences ont diminué au lieu de s’accentuer. Tout était à la guerre il y a six semaines, tout est maintenant à la conciliation et à la paix. On a bientôt compris qu’on s’était laissé emporter un peu loin par la passion de combat, que le meilleur moyen d’inspirer de la confiance au pays était de rester maître de soi-même, et le plus clair résultat des dernières crises a été de montrer que toutes les résolutions extrêmes ne conduisaient qu’à des impossibilités, qu’on ne pouvait se passer les uns des autres, qu’il y avait entre la majorité de l’assemblée et le gouvernement un lien indissoluble formé, imposé par un patriotisme supérieur. La réflexion, la vue du péril, la pression des circonstances et de l’opinion universelle, ont ravivé le sentiment des transactions nécessaires, et c’est ainsi que l’assemblée, un instant si agitée le mois dernier, a pu reprendre l’autre jour ses travaux dans des conditions d’apaisement qui sont la plus heureuse inauguration d’une année nouvelle.

Puisque le sentiment de la nécessité supérieure des choses a vaincu l’esprit de parti dans ces luttes passées, puisque la paix des pouvoirs publics a retrouvé les garanties que lui avaient fait perdre momentanément les susceptibilités, les malentendus et les défiances, l’essentiel maintenant est de tirer quelque avantage de cette victoire du bon sens, d’affermir autant que possible le terrain reconquis par une juste et prévoyante modération. Il ne suffit pas de se reposer dans la satisfaction d’avoir échappé à une crise qui pouvait être des plus périlleuses, il faudrait encore, si on le pouvait, se prémunir d’avance contre les crises qui pourraient renaître, écarter le danger de conflits incessans entre les pouvoirs. C’est surtout aujourd’hui l’œuvre de cette commission des trente, qui au milieu des dernières agitations parlementaires a été en quelque sorte chargée de liquider ces tristes querelles et de créer des conditions nouvelles en donnant une certaine cohérence, une certaine fixité à une situation qui sera tout ce qu’on voudra, définitive ou provisoire, qui dans tous les cas doit être adaptée aux premières nécessités de l’existence nationale. Où en est-elle de ses travaux, cette commission