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— Promettons-nous de punir quiconque se livrerait à des violences illégales ?

— Oui, seigneur.

— Promettons-nous de maintenir parmi les janissaires la discipline et l’honneur militaire ?

— Oui, seigneur.

— Promettons-nous de faire respecter les Francs, sujets des rois amis de notre magnifique sultan ?

— Oui, seigneur.

— De protéger les raïas tant que la Porte n’aura pas ordonné leur châtiment ?

— Oui, seigneur.

— En échange des promesses qui viennent d’être faites, ajouta le pacha, nous demandons à notre tour aux consuls de renvoyer dans leurs habitations les raïas qui se sont réfugiés dans les maisons des Francs.

— Nous y consentons, répondit le consul de France, après avoir pris l’avis de ses collègues ; mais, pour que ces familles tremblantes regagnent leur domicile avec quelque confiance, il est nécessaire qu’une proclamation les rassure.

— Des proclamations ! répliqua vivement le pacha. Les raïas y croyaient autrefois ! Aujourd’hui ils n’écoutent plus le crieur public. J’ai chargé leur archevêque et leurs primats de les engager à rentrer dans leurs demeures. Ces exhortations auront plus d’effet que toutes mes paroles. »

Ainsi finit cette cérémonie des promesses. En d’autres temps, l’engagement eût été tenu pour sacré ; mais les sermens des Turcs n’avaient plus de valeur. Triste effet et symptôme infaillible de leur décadence morale !

La garnison du château ne s’était pas seulement arrogé le droit de ne laisser sortir aucun bâtiment sans l’avoir préalablement soumis à la visite, elle retenait en dehors de la passe les navires de guerre qui se présentaient pour entrer en rade. On s’était résigné à subir cette exigence, tenant avant tout à ne fournir aucun prétexte au désordre ; mais le consul de France et le consul d’Angleterre s’en plaignaient avec amertume. « Prenez garde, disaient-ils au pacha. Un pareil acte est regardé par toutes les nations comme un commencement d’hostilités. Que dira le grand-seigneur quand il saura que vous l’avez mis dans une fausse position vis-à-vis de deux grandes puissances ? Il ne pourra s’en prendre qu’à vous du refroidissement de leur amitié. — Mes amis, répondait Hassan, je vais vous parler à cœur ouvert. Je sens très bien la vérité de ce que vous me dites ; mais je ne suis plus ici le maître. Si j’admets