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partis, par le désarroi de toutes les forces du gouvernement, que par une insurrection matérielle. Le général Serrano s’est hâté de quitter la Navarre, il est rentré à Madrid pour prendre la présidence du cabinet, à laquelle il avait été appelé par le roi Amédée. Or quel est ici l’état réel des choses ? Les chambres, telles qu’elles étaient sorties des dernières élections, offraient une majorité relativement conservatrice, et c’est sur cette majorité que devait s’appuyer le ministère du général Serrano ; mais dès le premier jour il s’est produit un fait aussi curieux que menaçant. Les partis hostiles ont commencé par manifester l’intention de quitter le congrès, où ils ne dominaient pas. Les carlistes ont été naturellement les premiers à battre en retraite. Quelques républicains se sont retirés, d’autres sont restés, en menaçant toutefois de se retirer à leur tour. Le chef d’une des principales fractions du parti radical rattaché à la monarchie, M. Ruiz Zorrilla, a donné lui-même sa démission avec éclat. On aurait dit que les uns et les autres avaient hâte de quitter les régions officielles pour attendre les événemens. Et dans ce qui reste du congrès, que se passe-t-il chaque jour ? Les républicains qui sont demeurés à leur poste ne se gênent guère pour annoncer la république. Les partisans du prince Alphonse parlent comme si le trône était déjà vacant et attendait celui qu’ils nomment le roi légitime. Faire face à cette situation n’était point facile, en vérité. Le général Serrano, après avoir obtenu des cortès l’approbation de sa conduite à l’armée du nord, a voulu aller plus loin : il a demandé au roi l’autorisation de proposer aux chambres la suspension temporaire des garanties constitutionnelles ; mais le roi n’a pas voulu suivre son ministre jusque-là. Le général Serrano est tombé après quelques jours de pouvoir, et par qui est-il remplacé ? Par le chef du parti radical, par M. Zorrilla lui-même, qui quittait l’autre jour bruyamment le congrès, de sorte que voilà en Espagne un premier ministre auprès d’une royauté qu’il abandonnait il y a quelques jours à peine, avec des chambres où il n’a pas la majorité, avec des finances ruinées, avec une insurrection carliste qui trouvera peut-être un encouragement dans ces crises nouvelles. Et c’est ainsi que marchent les choses quatre ans après une révolution qui devait régénérer l’Espagne !

CH. DE MAZADE.



Les susceptibilités du ministère de la marine ont été éveillées par un article publié dans la Revue du 15 février dernier sur le contrôle des arsenaux, et notamment par un passage où l’on discutait l’hypothèse de détournemens possibles avec le système de la comptabilité en valeurs. L’article dont il s’agit avait pour objet d’indiquer les améliorations introduites dans la comptabilité-matière de la guerre, et ne s’occupait qu’accessoirement de celle de la marine. Le paragraphe en question ne soule-