Page:Revue des Deux Mondes - 1872 - tome 99.djvu/919

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

« WAGTAIL. — Continuez comme si j’étais présent ; je vote pour le maintien de l’article tel qu’il est.

« TURNCOAT. — Au nom des dieux ! dites-moi, Trimsail, avez-vous jamais vu quelque chose de si honteux ? Ceci confirme ce qui m’a été dit ; le drôle est sur mon chemin et postule l’emploi pour lequel mon nom a été mis sous les yeux du gouverneur. Il faut, sans perdre de temps, le surveiller, ou il me jouerait quelque méchant tour. (Il court vers la porte.) « TRIMSAIL. — Eh ! qu’y a-t-il, Turncoat ? Êtes-vous malade ? Vous avez mauvaise mine, où allez-vous ?

« TURNCOAT. — Je suis tellement étranglé par l’indignation que me cause l’hypocrisie de ce drôle, que je suis impropre à tout travail. Je vais prendre l’air ; je me sens incapable d’écrire autre chose qu’une satire sur cette époque de dégénération.

« TRIMSAIL. — Mais notre rapport, mes amis, notre rapport sur l’article ?

« TURNCOAT. — Au diable l’article ! j’en vote, avec Wagtail, le maintien tel quel, faites votre rapport en ce sens. (Il sort.)

« TRIMSAIL. — Voilà un autre parasite flagorneur, un mendiant qui se vendrait à Tom, Dick ou Harry pour une croûte à mettre dans son sac. Et, ce qui pis est, des drôles comme Wagtail et Turncoat ont la présomptueuse hardiesse de vouloir se faire passer pour des hommes indépendans ! Et ce sont pourtant ceux-là qui obtiennent toutes les places, tandis que des hommes de mon mérite sont méconnus et mis de côté. Je serai vengé un jour ou l’autre ! mais voyons, comment rédigerai-je ce rapport ? (Il écrit.)

« À l’honorable assemblée des représentans de…

« Nous soussignés, par suite d’une résolution de votre honorable assemblée, ayant formé un comité, déclarons que, après avoir examiné à fond l’article 5,000 du code civil, soumis à notre appréciation, après avoir étudié la question sous toutes ses formes, nous sommes unanimement arrivés à la conclusion que ledit article ne demandait aucun amendement et devait être maintenu tel quel pour les raisons, — quelles raisons donnerai-je ? voyons,… ah ! c’est cela : — pour les raisons qui sont données par de savans commentateurs lorsqu’il fut inséré dans le code Napoléon, auquel il a été emprunté. » Voilà ! que les curieux cherchent ces raisons, ils les trouveront, s’ils le peuvent. Maintenant je n’ai plus qu’à signer : Trimsail, président. »


Ainsi le politicien américain n’est pas, comme le Rabagas français, un placeur de révolutions là où se fait sentir le besoin de déplacer le centre de gravité sociale, c’est au début de sa carrière un courtier d’élection et, s’il le faut, un entrepreneur de corruption électorale pour son compte au pour celui de s’on parti. La politique