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que ce nouveau mode de circulation servirait aux voyageurs beaucoup plus qu’aux marchandises. La statistique prouve que tous les intérêts en ont tiré parti et que les transports des produits s’y sont développés plus rapidement que ceux des personnes. Bien qu’il soit assez malséant de comparer un voyageur à une tonne, nous rappellerons que jusqu’en 1856 le chiffre du voyageur kilométrique excédait celui de la tonne. Depuis 1856, cette dernière a pris le dessus ; en 1869, on comptait 4 milliards de voyageurs et 6 milliards 1/2 de tonnes transportés à la distance d’un kilomètre, et l’écart devient chaque année plus grand au profit des marchandises. Comment les compagnies arrivent-elles à faire mouvoir cette masse énorme de milliards ? Par quels procédés et dans quelles conditions de sécurité opèrent-elles ces transports multipliés, encombrans, rapides, qui utilisent les rails et remplissent les gares ? La statistique du personnel et du matériel va nous le faire connaître par des chiffres qui dessinent en quelque sorte toute la manœuvre de l’exploitation.


II

Les chemins de fer ont à leur service une armée dont l’effectif en 1869 comptait 138,000 personnes, nous dirions 138,000 soldats, s’il n’y avait pas 10,000 femmes dans les rangs. Cet effectif a presque doublé depuis dix ans. Il était en 1859 de 75,000 employés pour l’exploitation de 9,061 kilomètres, soit 8 employés 36 centièmes par kilomètre. L’effectif de 138,000 employés, recensé en 1869 pour le service de 16,973 kilomètres, donne la proportion de 8 employés 14 centièmes par kilomètre. Le chiffre kilométrique a donc peu varié. Avec l’extension du réseau, le nombre des agens de l’administration centrale a diminué proportionnellement ; il y a eu au contraire augmentation dans le personnel des gares et de la voie, parce que le développement considérable du trafic a nécessité un surcroît de bras et de surveillance. Quant au personnel attaché à la traction et à l’entretien du matériel, il ne s’est pas accru dans la même proportion que le réseau : il est en effet plus facile de combiner économiquement la manœuvre des locomotives et des wagons sur de grands parcours que sur de petites distances. Voici au surplus comment se répartissait le personnel des divers services en 1869 :


Administration centrale 2,028
Mouvement et trafic 54,539
Traction et matériel 34,530
Voie et bâtimens 47,150
Total 138,247