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témoins de son enseignement. Comme ingénieurs et même comme personnages politiques, car aujourd’hui l’industrie mène à tout, ses anciens élèves occupent dans leur pays les plus hautes fonctions. Qu’il nous soit permis, dans notre infortune nationale, d’éprouver quelque consolation en voyant circuler ainsi partout la marque de notre puissance intellectuelle ! Ces étrangers, nos cliens et nos élèves, doivent à la France gratitude et respect ; volontairement ils sont venus lui demander avec la science leur instrument de travail, de renommée et de bien-être, ils ne sauraient oublier le profit qu’ils ont retiré de nos leçons et qu’ils ont ensuite répandu autour d’eux. Certes il est bien honorable pour la France que des Anglais, des Américains, des Allemands sollicitent par le concours l’admission dans ses écoles. Rien n’est perdu, ou plutôt tout peut se réparer, tant que nous conserverons la réputation de notre enseignement. L’influence est là, ainsi que la force. Nous avons d’ailleurs un intérêt direct à ce que le gouvernement, devenu propriétaire de l’École centrale, continue à bien accueillir les élèves étrangers. Ceux-ci, de retour dans leur pays en qualité d’ingénieurs, de manufacturiers ou de négocians, conservent avec nous d’utiles relations de confraternité, qui ne sont pas indifférentes pour le mouvement de nos affaires ni pour la carrière de leurs anciens camarades. La France, où ils ont appris ce qu’ils savent, occupe naturellement dans leurs souvenirs et dans leur affection une place privilégiée.

Lors de l’enquête qui a été ouverte en 1863 sur l’enseignement professionnel, on a examiné avec beaucoup de soin la question de savoir si les écoles techniques ne devraient pas organiser des ateliers modèles à côté des amphithéâtres où les cours sont professés, de telle sorte que l’élève pût s’initier à la pratique en même temps qu’à la théorie. On a cité diverses écoles, même du degré supérieur, où ce système est adopté. Les fondateurs de l’École centrale n’ont point jugé qu’il convînt de l’introduire dans leur plan d’études, qui avait pour principal objet la connaissance des principes sur desquels repose la science industrielle. Deux années, puis trois, leur parurent à peine suffisantes pour donner aux élèves le degré nécessaire d’instruction théorique et les notions du dessin. Il fallait, suivant eux, laisser aux écoles d’arts et métiers et aux établissemens d’apprentissage les exercices du travail manuel. Indépendamment des difficultés matérielles d’installation dans un local qui ne devait pas tarder à devenir trop exigu, le mélange des deux enseignemens aurait eu l’inconvénient de diminuer le nombre d’heures consacrées chaque jour aux études scientifiques et il n’eût été que d’un profit très restreint et fort contestable, car, s’il est nécessaire qu’un ingénieur ou un constructeur de machines connaisse