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siècle, qui absorbe, sans partage et dans l’ombre, la vie de son fondateur, M. Demetz. Au contraire nous avons vu naguère l’École d’administration et l’institut agronomique de Versailles ne pouvoir se fonder, entre autres raisons, parce que ceux qui en avaient conçu la pensée ne se mirent pas eux-mêmes à l’œuvre pour la réaliser. » Rien n’est plus vrai. L’initiative des particuliers peut créer un établissement, elle peut essayer à ses risques et périls ce que l’état ne veut pas risquer, il est désirable qu’elle continue pendant quelque temps à l’œuvre commencée la sollicitude et la passion paternelle ; mais, une fois le succès obtenu, il arrive un moment où se manifeste la fragilité des œuvres individuelles. De même que les grandes usines sont obligées un jour ou l’autre de se consolider par le régime de l’association, de même les grandes écoles ne peuvent assurer leur avenir qu’en se constituant sous la forme de corporation ou en se livrant à l’état, qui n’est autre chose que la corporation nationale. Ce qui survit aux individus, c’est la pensée qui les a inspirés avec le souvenir et l’exemple du bien qu’ils ont fait. — Le gouvernement résolut enfin d’accepter l’offre qui lui était soumise, et, par la loi du 19 juin 1857, l’École centrale des arts et manufactures devint un établissement de l’état.


II

En prenant possession de l’École centrale, le gouvernement eut le bon esprit de n’apporter aucune modification à l’organisation intérieure ni au système d’enseignement. Il profita des ressources qui lui étaient léguées pour augmenter le nombre des professeurs et pour aménager le local, devenu trop restreint, de manière à recevoir un plus grand nombre d’élèves ; mais il conserva fidèlement le plan d’études, le mode d’admission, la discipline intérieure, sous la direction du conseil de perfectionnement. Tout se bornait à un changement d’état civil ; l’institution demeurait intacte. On peut donc apprécier, d’après une expérience qui déjà remonte à plus de quarante ans, le régime administratif de l’École centrale, régime qui s’écarte, sur plusieurs points essentiels, de celui qui est adopté dans la plupart des écoles publiques avec lesquelles la comparaison peut s’établir.

Bien qu’ils soient admissibles dès l’âge de dix-sept ans, les élèves ne sont point casernés comme ceux de l’École polytechnique et de l’École normale. Ils ne passent que la journée à l’école, de huit heures et demie du matin à quatre heures du soir, et ce temps est employé à l’audition des cours, aux examens, à l’étude du dessin, qui tient une grande place dans l’enseignement, ainsi qu’aux