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écrivit en latin. Son ouvrage sur le Droit et les devoirs de la guerre contient des maximes remarquables qui ont été trop méconnues dans ces derniers temps. Il pose entre autres trois principes : 1° que la guerre ne peut se justifier que par la nécessité ; 2° que dans une guerre même juste on ne doit pas se proposer la destruction de l’ennemi, on doit se contenter de lui infliger des dommages dans la mesure qu’il faut pour assurer la paix ; 3° que le vainqueur doit faire usage de la victoire avec modération et humanité chrétienne. Cet auteur recommandable supposait, on le voit, que le sentiment chrétien était au fond des cœurs, que la morale chrétienne était le type auquel devraient désormais se conformer les actes des hommes d’état et des princes. Il ne prévoyait pas l’apparition et l’influence des hégéliens au XIXe siècle.

L’opinion des publicistes qui ont écrit avec distinction sur le droit international a souvent été transportée de leurs livres dans les traités ou actes internationaux souscrits par des peuples investis d’une grande puissance. Malheureusement ces victoires qu’elle remporte n’ont jamais rien de définitif ni même de stable, la force brutale pouvant toujours intervenir, par un subit accès de furie, pour les annuler, et en effacer les effets, ce qui est assurément une des données les plus affligeantes de l’existence du genre humain. Les règles posées par les écrivains qui font autorité à l’égard du droit international, ces règles, qui sont si peu des barrières infranchissables pour certains hommes à l’audace effrénée, mais qui n’en sont pas moins des protestations contre leurs aberrations et leurs excès, ont pour objet de déterminer l’ensemble des obligations mutuelles des états, c’est-à-dire des devoirs qu’ils ont à remplir et des droits qu’ils ont à défendre les uns à l’égard des autres. Telle est la définition que M. Calvo donne du droit international. Un auteur fréquemment cité par lui, M. Pinheiro Fereira, dit à peu près de même qu’il existe des lois obligatoires, des droits et des devoirs, pour les nations aussi bien que pour les individus, et que le droit international est l’exposé motivé de ces lois. On peut préférer la définition donnée par un jurisconsulte américain, M. Wheaton[1]. Elle est plus complète en ce qu’elle montre la tendance des peuples civilisés à se rapprocher, tendance bienfaisante qui reparaît toujours à travers les symptômes contraires, malgré les passions et les systèmes qui conspirent pour l’étouffer. La définition de M. Wheaton a aussi l’avantage de tenir compte de la perfectibilité, que la législation internationale devrait refléter autant qu’une autre. « Le droit international, dit-il, est l’ensemble des règles de

  1. Cet auteur est mort après avoir dignement représenté son pays au dehors ; on lui doit un remarquable traité du droit international, augmenté depuis d’un lumineux commentaire par un de ses compatriotes, M. Lawrence.