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instrumens et les réactifs essentiels qu’on ne peut partout emporter avec soi sans se surcharger d’un bagage incommode. Il n’est pas douteux qu’avant peu d’années ces stations n’aient rendu aux sciences naturelles les plus signalés services, et là encore notre pays s’est trouvé en avance. Voilà douze ans que nous avons, par l’initiative de M. Coste, une station zoologique sur les bords de l’Océan. Certes elle est appelée d’un jour à l’autre à jouer un rôle encore plus important lorsqu’elle aura reçu une organisation définitive : telle qu’elle est cependant, elle a contribué déjà pour une part notable aux progrès de la biologie en France.


IV

S’il était inutile de chercher à multiplier le poisson de mer, population errante qu’une marée, un coup de vent, un calme, la pluie même, chassent au large pour toujours, le problème, quand il s’agit de l’huître ou de la moule qui vivent fixées à la roche, se présente dans des termes presque aussi simples que celui d’empoissonner le moindre ruisseau coulant. Aussi l’ostréiculture est-elle vite devenue lucrative. Chose merveilleuse, l’état lui-même a pu organiser et gérer avec succès un certain nombre d’huîtrières. Il n’en fallait pas tant pour éveiller l’intérêt privé, et la nouvelle industrie a grandi rapidement sur toutes les parties du littoral où elle est praticable. Au fond même du port de Concarneau, dans la rivière d’Auray, aux îles françaises, sur tout le périmètre du bassin d’Arcachon, il y a de ces établissemens en plein rapport.

Pour l’huître, comme pour tout animal, le point de départ d’une production sérieuse était l’étude des circonstances où elle vit, où elle se reproduit. C’est encore à un naturaliste français, M. Davaine, qu’on doit ces renseignemens nécessaires sur l’embryogénie de l’huître. Les œufs, qui sont extrêmement petits, restent jusqu’à l’éclosion entre les valves de la coquille. Les embryons ne ressemblent pas d’abord à ce qu’ils seront plus tard, ils nagent avec agilité au moyen d’un organe spécial, ils vaguent à l’entour de l’huître mère, et ne se posent point jusqu’à un moment donné. Alors ils s’arrêtent, l’organe de natation peu à peu disparaît, l’animal est fixé pour toujours. Cependant ce naissain ne va jamais loin. Il suffit, pour le retenir, qu’il trouve près de là quelque corps dur, bois, tuile, pierre, où s’attacher. Au bout d’un an, la jeune huître pond à son tour ; au bout de deux ans, elle est presque marchande. La multiplication des huîtres se fait donc seule. Comme soins propres à augmenter la récolte, on jette simplement à portée des embryons quelques fascines ou de vieux débris de poterie et de brique pour