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une part léonine dans le monopole tant décrié par lui sous fie règne de Louis-Philippe. Sauf une infime minorité qui n’a pas voulu renier son drapeau, le parti s’est rangé à une transaction, qui au fond lui donnait tous les avantages. Que telle soit la vraie signification de la loi du 15 mars 1850, c’est ce qui ressort du discours prononcé le 17 janvier de la même année par le plus illustre représentant du catholicisme français, qui, dans l’ardente mobilité de ses sentimens, devait, quelques années plus tard, flétrir de mots sanglans l’ultramontanisme. « Nous avons, disait-il, appelé la religion, représentée par les ministres des différens cultes et surtout par l’épiscopat, à intervenir d’une manière régulière dans le gouvernement de l’éducation. »

Le rétablissement de la loi de 1850 est actuellement l’un des objectifs principaux du parti ultramontain. L’empire l’avait quelque peu modifiée, non pas au profit de la liberté, cela va de soi, mais pour la mettre d’accord avec son régime dictatorial. Il avait partout supprimé l’élection pour lui substituer le bon plaisir ministériel ; il avait cherché surtout à enlever au professorat toute garantie d’indépendance en lui retirant l’inamovibilité. Le catholicisme s’est très bien accommodé de l’empire, tant que celui-ci a eu besoin de lui et lui a prodigué ses faveurs ; toutefois, depuis l’expédition d’Italie, qui a eu son contre-coup dans la politique intérieure, la brouille a été complète, et, comme toujours, elle a été envenimée par les questions d’instruction publique. On se souvient de l’animosité que le clergé a montrée au ministre de l’empire qui a le plus fait pour propager l’instruction populaire. On ne l’a pas attaqué pour sa direction de l’enseignement supérieur, qui prêtait à des critiques fondées ; on s’est acharné sur ce. qu’il faisait de bien. On le savait partisan de l’obligation dans l’instruction primaire, il poussait l’audace jusqu’à faire servir l’enseignement universitaire à l’instruction des jeunes filles. Qui ne se souvient de la croisade épiscopale organisée contre lui et des débats ridicules dont retentit le sénat à l’occasion des bibliothèques populaires ? Cette croisade venait à peine d’être terminée quand l’empire s’écroula. Le parti ultramontain n’a rien eu de plus pressé que de courir sus aux questions d’enseignement et de demander la remise en vigueur de la loi de 1850 dans ses dispositions les plus caractéristiques.

C’est au moment où cette tentative s’accusait de plus en plus par des propositions dues à l’initiative parlementaire que le ministre de l’instruction publique déposa son projet de loi sur l’instruction primaire. On sait quels débats passionnés il souleva dans les bureaux de l’assemblée, quelles protestations indignées il provoqua dans la plupart des diocèses. Rappelons les principales