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brutale ; l’inégale répartition, quand les services rendus ne sont pas égaux, est une opération qui peut être parfois compliquée, mais qui réalise l’équité, la loyauté des contrats. L’administration française, qui, nous l’avons démontré plus haut à son honneur, a fait le plus de sacrifices pour améliorer le régime postal, devait naturellement en réclamer le prix dans les traités qu’elle avait intérêt à conclure, et déjà, sous le gouvernement de juillet, elle avait réussi à obtenir de plusieurs états étrangers une part supérieure des recettes produites par les correspondances étrangères. Appelée à étudier la question en 1849 et en 1850, à l’occasion des traités conclus avec la Belgique et la Suisse, l’assemblée législative avait proclamé la justice du principe invoqué par le gouvernement et tracé la règle à suivre en pareille matière lors des futures négociations.

En 1851, la même assemblée eut à examiner le traité conclu le 9 novembre 1850 entre la France et la Sardaigne. Le rapporteur de la commission, M. de Lagrené, indiqua de nouveau les principes qui doivent régir les conventions postales ; il le fit en termes si nets et si clairs qu’il nous paraît utile de reproduire cette partie du rapport. « Pour être conforme au principe de la vérité, la répartition entre les parties contractantes du prix fixé pour les lettres internationales doit être exactement proportionnelle aux services rendus et aux dépenses effectuées de part et d’autre. Il fallait une enquête pour dégager tous les élémens du problème à résoudre : elle a été contradictoirement opérée, pendant cinq jours, des deux côtés de la frontière, et qu’il nous soit permis à ce sujet de féliciter les deux gouvernemens d’être entrés dans cette voie de l’enquête si laborieuse, il est vrai, mais si féconde en enseignemens profitables. L’enquête en effet, quand il s’agit d’arriver à une solution conforme aux règles de la justice et de la proportionnalité, est la seule base rationnelle d’une négociation sérieuse,… elle seule, au nom des faits, en vertu de la précision des chiffres, peut avoir l’autorité nécessaire pour dominer l’antagonisme des intérêts contradictoires et ramener à une moyenne équitable les prétentions divergentes. — Le résultat de l’enquête a été de constater que la distance utilement parcourue sur les territoires respectifs par les correspondances échangées entre les deux pays avait été, pour la France, de 2,971,078 kilomètres, et, pour la Sardaigne, de 1,122,064 kilomètres. — La taxe uniforme ayant été préalablement fixée à 50 centimes par lettre, il ne restait plus qu’à répartir équitablement cette somme entre les deux offices, proportionnellement aux frais de transport réciproques constatés par la distance, en tenant compte des frais généraux qui sont en proportion inverse de l’importance de chaque administration. — Telle a été la base du calcul dont le