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n’est pas juste qu’une catégorie particulière de correspondances échappe à cette triste loi, et c’est le cas plus que jamais de tenir bon pour l’application du principe qui recommande d’assurer à chacun des deux pays, liés par une convention, la perception de son tarif intérieur sur les lettres internationales.

L’explication de la clause qui a été acceptée au nom de la France se fonde sans doute sur l’avantage que présenterait la suppression de tous comptes entre les deux offices, peut-être aussi sur la résistance qu’aurait opposée le négociateur allemand, si l’on avait voulu obtenir une répartition inégale des produits entre la France et l’Allemagne. Il est délicat d’apprécier des discussions diplomatiques, et l’on doit y apporter de grands ménagemens, aujourd’hui surtout qu’il faut tenir compte des difficultés de notre situation et du caractère des parties en présence. Aussi nous oserions à peine nous permettre ces observations, si nous n’avions pour nous soutenir non-seulement le sentiment de l’intérêt national, mais encore les principes de notre législation, l’avis formel de l’assemblée législative de 1851, la pratique constante de plus de vingt années et l’adhésion que les puissances étrangères, la Prusse entre autres, ont donnée à ces principes en les pratiquant elles-mêmes.

Certes rien ne paraît plus simple, au premier abord, que de partager également entre les deux pays qui se lient par un traité les produits de la recette postale. Chaque nation n’a-t-elle pas un égal intérêt à l’établissement de correspondances régulières et rapides ? A quoi bon compliquer les opérations par des calculs qui seront toujours plus ou moins hypothétiques ? N’y a-t-il pas en outre un regrettable préjugé d’infériorité contre celui des deux gouvernemens qui accepterait pour l’échange des dépêches une rétribution moindre que celle dont l’autre serait appelé à profiter ? Voilà comment on tente de soutenir le principe du partage égal des recettes ; mais, en pareille matière, l’égalité absolue n’aboutit le plus souvent qu’à l’injustice. Le premier fondement d’une convention, c’est la réciprocité ou, pour mieux dire, l’équivalence des avantages que les deux parties contractantes s’accordent mutuellement. Si l’un des deux pays a une plus grande étendue, s’il est mieux desservi, s’il fait plus de sacrifices que l’autre pour son organisation, évidemment il a droit à un prélèvement plus fort sur les recettes de la correspondance internationale, et il serait lésé par un égal partage. De même, s’il est reconnu que, par l’effet des relations établies, le plus long parcours des dépêches s’effectue sur l’un des deux territoires, il est logique d’allouer une rétribution plus élevée à l’administration qui supporte ainsi le plus de dépenses. Le partage égal des recettes est une opération simple, mais arbitraire et