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l’Annuaire des postes de 1867 que ce chiffre pouvait être alors estimé à 61,814,000 francs. Plus récemment, les six principales compagnies ont fourni le chiffre de 22 millions, auquel s’ajouteraient les transports opérés par les compagnies secondaires. La différence entre les deux évaluations est très considérable. Quoi qu’il en soit, si l’on accepte le chiffre de l’Annuaire, le bénéfice apparent de 27 millions, porté au budget des postes pour la période triennale de 1867 à 1869, se transforme en une perte annuelle de 34 millions, et si l’on prend pour base le chiffre énoncé par les compagnies, il n’y a ni gain ni perte. Ainsi, contrairement aux offices anglais et allemand, qui retirent l’un et l’autre un profit net et certain du transport des correspondances, l’administration française ne réalise aucun bénéfice, si même elle ne subit pas une perte. C’est l’idéal des économistes, qui refusent aux gouvernemens le droit d’exploiter la poste comme un élément de revenu. La taxe française n’est devenue un impôt que depuis son relèvement à 25 centimes. Il n’est pas besoin de rappeler les motifs de cette augmentation, qui pèse lourdement sur nos correspondances intérieures, et qui doit peser de même sur les correspondances que la France échange avec l’étranger.

À quel titre les lettres allemandes, qui sont admises dans l’intérêt commun à circuler sur notre territoire et à profiter de notre service perfectionné, de nos nombreux bureaux, de notre armée de facteurs, — à quel titre ne paieraient-elles au trésor français que 20 centimes, quand nos lettres nationales paieront 25 centimes ? D’un autre côté, alors que la taxe intérieure de l’Allemagne est de 12 centimes 1/2, prix rémunérateur et même profitable, pourquoi l’administration de Berlin percevrait-elle sur les lettres échangées entre la France et l’Allemagne, pour la part afférente au parcours sur son territoire, une taxe de 18 centimes 3/4 ? De telles conditions semblent difficiles à justifier. À quelque point de vue que l’on se place, les dépêches internationales ne méritent pas d’être mieux traitées que les dépêches nationales. Si l’office qui expédie est dispensé de la levée de la lettre, et si l’office qui reçoit n’a point à faire la distribution, cette économie est largement compensée par le plus long parcours moyen des lettres en provenance ou à destination de l’étranger. Les dépêches internationales, consacrées pour la plupart aux correspondances de la banque et du commerce, ne sont pas plus intéressantes, s’il nous est permis d’employer ce terme, que nos correspondances de famille ou celles du commerce intérieur : les profits de la banque et du commerce avec l’étranger proviennent ordinairement d’opérations plus considérables qui peuvent le plus aisément supporter la taxe, quelle qu’elle soit. Enfin, puisque la France est condamnée à payer un surcroit d’impôt, il