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LES
MISSIONS EXTERIEURES
DE LA MARINE

II.
DÉLIMITATION DU MONTENEGRO.


I

En 1858, je commandais sur la rade de Toulon une des divisions de l’escadre de la Méditerranée. Dans les premiers jours du mois de mai, je reçus soudainement l’ordre de partir avec deux vaisseaux pour Raguse. Sourde aux représentations du gouvernement français, la Porte-Ottomane avait résolu d’en finir avec ce qu’elle appelait la rébellion des Monténégrins. Elle avait dirigé contre eux des troupes de la Roumélie ; elle voulait en envoyer de Constantinople. Cette expédition se préparait dans le Bosphore, malgré les conseils, malgré les instances de M. Thouvenel. Mes instructions me prescrivaient de m’opposer au débarquement projeté. Je partis à la hâte ; mais, lorsque j’arrivai devant Raguse, j’y trouvai une tout autre mission que celle qui m’avait été indiquée. La fortune s’était prononcée contre les Turcs, il ne restait plus qu’à chercher une transaction équitable entre les prétentions des belligérans. Ce fut la tâche d’une commission européenne dans laquelle les lumières et l’activité du consul de France à Scutari, M. Hecquard, nous donnèrent, dès le premier jour, un complet ascendant. Si la délimitation du Monténégro a été un service rendu à la grande cause de la civilisation chrétienne, le principal honneur en revient à la diplomatie