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çaise dans son unité morale, le pays dans son indépendance nationale. D’autres et notamment le rapporteur de la commission de l’assemblée, M. Sacaze, avaient commencé avec talent l’instruction de ce procès, le garde des sceaux, M. Dufaure, vient de l’achever avec une verve singulière d’éloquence et de bon sens. Ce n’est pas la loi qui interdit l’eau et le feu à l’Internationale, c’est l’Internationale qui s’est placée d’ellemême hors de la loi française. Il n’y a plus en vérité qu’à constater cette situation. L’unique question est de savoir quel est le meilleur moyen d’assurer à la société française une défense, aux ouvriers eux-mêmes une sauvegarde contre ceux qui exploitent leur misère ou leur crédulité pour chercher jusque dans le sang et les ruines la satisfaction d’une malsaine ambition.

C’est le malheur de la France de s’être trouvée d’un seul coup réduite à toutes les extrémités, atteinte dans sa force militaire, dans sa sécurité intérieure, dans son prestige et son ascendant de puissance européenne. Elle a eu tout à refaire à la fois, une armée, un gouvernement, des finances, une administration, une diplomatie. Est-il surprenant que de si grands désastres ne se réparent pas en un jour, qu’une nation si éprouvée, cette nation fùt-elle la France, ne se relève point instantanément, qu’elle se sente embarrassée, enchaînée dans son action ? Non, ce n’est pas là ce qui doit surprendre, et il est trop clair qu’il y a une sorte de contradiction douloureuse entre le souvenir de ce qu’on pouvait autrefois et le sentiment de ce qu’on peut aujourd’hui. L’essentiel est qu’on se fasse des idées et un système de conduite en rapport avec les circonstances, de telle façon que notre pays puisse ressaisir par degrés le fil de ses destinées, retrouver cette prospérité dont il a en lui-même tous les élémens et le rang qui lui est dû en Europe. C’est surtout dans la politique extérieure l’affaire de notre diplomatie.

La grande et unique préoccupation de notre diplomatie doit être évidemment aujourd’hui de reprendre partout, si l’on nous passe le terme, une bonne position, de ne rien compromettre, de savoir où sont nos amis, 01^1 sont nos ennemis, et surtout de renouer patiemment tous ces liens de traditions, d’intérêts, de civilisation commune, qui unissent la France aux nations qui l’entourent, que les événemens ont pu mettre à l’épreuve sans les rompre. Pense-t-on qu’il fût très opportun d’engager l’action de la France dans certaines questions avec l’unique chance de créer des susceptibilités et des froissemens là où il n’y aurait, si on le voulait, qu’une amitié et des affinités naturelles ? Nous parlons ici plus particulièrement de l’Italie et de nos relations avec le cabinet de Rome. Le gouvernement, qui a dans les mains tous les fils de la politique extérieure, a sagement compris l’intérêt supérieur de la France ; il n’a pas voulu laisser planer plus longtemps un nuage ou une équivoque sur ses rapports avec le gouvernement italien, et M. Fournier est décidément officiellement ûommé ministre de France à Rome. Ce