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pour 100 livres ou 1/2 pour 100; la propriété ne perd donc presque rien à changer de mains. Les droits de succession sont les suivans :


Pour le fils, la fille ou le successeur en droite ligne 1 pour 100 sur la valeur.
Pour le frère, la sœur ou leurs descendans 3 pour 100 —
Pour frère ou sœur de père ou de mère et leurs descendans 5 pour 100 —
Pour frère ou sœur de grand-père et grand’mère 6 pour 100 —
Aux autres degrés ou pour les étrangers 10 pour 100 —


II.

L’aristocratie anglaise a son fondement sur la richesse; sa puissance n’est pas seulement, comme celle des noblesses proprement dites, une puissance d’imagination. Ce qui donne le pouvoir, c’est la propriété, et de toutes les propriétés la plus robuste, la plus inébranlable, — ce ne sont pas des noms vains, des fictions, des symboles; sous les apparences idéales, il y a une trame ferme et résistante. L’esprit barbare a toujours respecté la force, la possession, le succès; il a vu dans la propriété la vraie garantie de la liberté. Est-on libre quand il faut tendre la main? D’où vient que l’église anglicane se sent indépendante des particuliers, des administrations locales, des représentans de l’état? C’est qu’elle est propriétaire. Ses biens sont sous la sauvegarde de l’état (l’on peut même ajouter à sa discrétion), mais elle ne reçoit pas, à proprement parler, de salaire. Pourquoi les églises dissidentes sont-elles indépendantes? C’est parce qu’elles possèdent des maisons, des églises, des revenus. On peut en dire autant des universités, des écoles, des corporations, des sociétés de tout genre. La chambre des pairs peut être considérée comme propriétaire, car l’ensemble des domaines attachés aux pairies est comme un trésor qui lui appartient. Sans le droit de propriété, il n’y a pas d’indépendance durable.

Le protestantisme a encore concouru à rattacher la race anglaise à la possession des biens terrestres. Avant toute autre nation d’Europe, l’Angleterre a connu le pouvoir de l’argent : la première, elle a eu de bonnes finances. L’économie politique, la science des richesses, a trouvé là sa terre bénie. Le catholicisme avait fait de la pauvreté une vertu et montrait dans le ciel la seule conquête digne de l’ambition humaine; il livrait la terre aux ordres religieux, qui la laissaient stérile. La misère aux pays latins est encore presque un signe de sainteté, une grâce terrestre. La route étroite du ciel ne doit avoir que des ronces, des pierres et des épines. Que sont