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nombre rapportant, tous frais faits, une obole par jour et par esclave, le produit annuel sera de 60 talens[1]. » Xénophon propose ensuite d’ouvrir de nouvelles mines, et d’associer dans cette entreprise les dix tribus d’Athènes, à chacune desquelles l’état accorderait le même nombre d’esclaves. Il prévoit le cas où la guerre viendrait de nouveau désoler l’Attique, et il croit nécessaire d’ajouter aux fortifications d’Anaphystos et de Thorico un troisième fort intermédiaire à l’endroit le plus élevé du vallon qui les sépare[2].

Les conseils de Xénophon paraissent avoir été entendus. Quelques années plus tard, les recherches étaient poussées avec une telle activité qu’au dire de Démétrius de Phalère les Athéniens semblaient vouloir arracher Pluton lui-même des entrailles de la terre ; mais le succès ne répondit pas aux espérances qu’on avait conçues. Au premier siècle avant notre ère, un soulèvement d’esclaves mit fin aux travaux de mines proprement dits. Les entrepreneurs traitant leurs ouvriers d’une manière inhumaine, ceux-ci se révoltèrent, sortirent armés du sein de la terre, mirent tout à feu et à sang, prirent Sunium d’assaut, portèrent la désolation dans les bourgades voisines, et saccagèrent tellement toute la côte maritime de l’Attique qu’elle ne put jamais se rétablir.

Au temps de Strabon (10 ou 15 ans avant Jésus-Christ), les mines de l’Attique étaient considérées comme épuisées ; les fondeurs se contentaient de traiter, non plus les minerais provenant des travaux souterrains, mais les anciens débris de mines et les scories, dont ils savaient extraire le plomb et l’argent que les procédés imparfaits des anciens y avaient laissés. Cette même opération, comme on le verra tout à l’heure, a été tentée avec succès par les modernes. Le fait rapporté par Strabon explique la teneur relativement pauvre des scories du Laurium comparée à celle des scories antiques d’Espagne et de Sardaigne. Enfin Pausanias (174 ans après Jésus-Christ) par le de l’exploitation de ces mines comme d’un fait historique enseveli dans la nuit du passé.

Pendant cette longue période, l’activité industrielle du Laurium avait été considérable : des milliers de travailleurs esclaves y avaient consumé leurs forces, et plus d’un avait payé de sa vie l’avidité des entrepreneurs, qui abattaient les piliers de soutènement ménagés dans les travaux. La condition de ces malheureux devait être extrêmement dure. C’étaient d’anciens hommes libres trahis par. la fortune de la guerre, ou des habitans des côtes de la Macédoine, de la Thrace et de l’Asie-Mineure enlevés de force par les marchands

  1. Près de 450,000 francs.
  2. Probablement à Camaresa.