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les préparatifs de la guerre du Péloponèse. Les mines étaient la propriété de l’état, qui, louait aux citoyens par bail perpétuel, aliénable et transmissible aux héritiers. Outre la redevance annuelle dont il a été parlé ci-dessus, la concession était accordée moyennant une somme d’un talent et demi (8,100 francs). Tel est le prix qui fut payé par Vicias, par Callias et par un nommé Panténétes ; ce dernier en acheta une autre moyennant 45 mines (4,050 francs). D’après une curieuse inscription trouvée à Thorico, Pheidon d’Aixonie, dème de l’Attique, acheta les esclaves et les mines de la plaine voisine à la (condition que le vendeur pourrait, moyennant remboursement du prix d’achat, rentrer en possession de sa propriété. Dans cette inscription, l’ensemble de l’exploitation est désigné sous le nom d’Ergastiria, que l’on retrouve avec la même acception dans un discours de Démosthène. Le droit d’exploitation était appuyé sur des plans qui indiquaient les limites des concessions, et l’on devait ménager entre chacune d’elles à l’intérieur des travaux des piliers de séparation[1]. Néanmoins l’exploitation des mines donnait lieu à de nombreux procès. Les entrepreneurs se faisaient la guerre sous terre, se pillaient les uns les autres, et venaient ensuite se plaindre devant les juges en employant des termes de leur art que ces magistrats ne comprenaient point. On fut obligé de créer pour ces sortes de contestations un tribunal spécial qu’on nomma cour métallique, et les lois qui y étaient relatives s’appelaient lois métalliques. Les juges étaient choisis parmi les hommes experts dans l’art des mines et de la métallurgie[2].

La malheureuse guerre du Péloponèse porta un coup funeste à l’exploitation des mines en même temps qu’à la puissance de la république. Dès la deuxième année de la guerre, les Lacédémoniens envahirent l’Attique, et, après avoir ravagé la plaine, s’avancèrent vers la partie qu’on appelle maritime (Paralos), jusqu’au pied du mont Laurium, où les Athéniens avaient leurs mines d’argent. Toutefois les travaux furent repris avec activité après le départ des ennemis, continuèrent à enrichir Athènes, lorsque Alcibiade, trahissant les secrets de la puissance de son pays, engagea les Lacédémoniens à fortifier Décélie qu’ils occupaient, et à s’emparer des mines. Ce conseil fut écouté, et l’année suivante, la dix-huitième de la guerre, vit la ruine complète de l’entreprise. Pendant que les Lacédémoniens ravageaient la contrée et interceptaient les convois de blé qui se rendaient autrefois de l’Eubée à Athènes par Oropos, 20,000

  1. Nous devons ces détails à une obligeante communication. de M. Cordella, Ingénieur de l’usine actuelle d’Ergastiria.
  2. De Pauw, Recherches philosophiques sur les Grecs, t. II, chap. 4.