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pour les indigènes. Au cap de Bonne-Espérance, le thermomètre marque 43 degrés. Quelquefois cependant une pareille chaleur est meurtrière. On rapporte entre autres cas qu’au mois de juin 1738, dans les rues de Charlestown, plusieurs personnes moururent sous l’influence de 41 degrés. On a vu souvent, en Afrique, nos soldats parcourant une longue route, sous les rayons. d’un soleil ardent, être pris de délire et succomber, mais ici l’influence de la lumière s’est jointe à celle de la chaleur. Duhamel cite l’histoire de plusieurs servantes d’un boulanger qui pouvaient, sans en être incommodées, séjourner pendant près de dix minutes dans un four chauffé au degré nécessaire pour la cuisson du pain. L’expérience a été répétée depuis. Il n’y a rien de contradictoire dans ces faits. L’animal peut supporter quelque temps une température très supérieure à la sienne, parce que la transpiration fort énergique qui a lieu alors s’oppose à réchauffement de ses organes ; néanmoins, comme nous l’allons voir, sitôt que sa chaleur interne s’élève réellement de quelques degrés au-dessus du chiffre normal, la vie n’est plus possible.

L’étude de ces phénomènes n’avait guère été poussée plus loin, quand en 1842 M. Claude Bernard y consacra des recherches qu’il a reprises et complétées l’année dernière, et dont il vient de publier les résultats. Ce physiologiste s’est servi d’une caisse de sapin divisée en deux parties par un treillage sur lequel on place l’animal soumis à l’expérience. La caisse repose sur une plaque de fonte, et le tout est disposé sur un fourneau qui échauffe plus ou moins l’air de l’appareil. Une fenêtre placée latéralement dans celui-ci permet de fixer à volonté la tête de l’animal hors de la caisse. En examinant les animaux soumis dans ces conditions à l’influence de l’air plus ou moins chaud, M. C. Bernard a vérifié les premières observations de Berger et Delaroche, et en a fait de nouvelles plus importantes. Boerhaave avait attribué la mort à l’application de l’air chaud sur le poumon, qui empêcherait le rafraîchissement du sang. M. Bernard a montré par des expériences que l’air chaud agissant sur la peau produit une élévation de température plus promptement mortelle que lorsque ce fluide est seulement introduit dans l’appareil pulmonaire. Il a constaté aussi que, lorsque l’air chaud est humide, les phénomènes affectent une marche plus rapide, et la mort survient beaucoup plus vite et à une température plus basse que dans l’air sec. Cette différence résulterait de ce que l’humidité favorise réchauffement.

Lorsqu’un animal est soumis aux effets toxiques de la chaleur, il présente une série de phénomènes constans et caractéristiques. Il est d’abord un peu agité, puis haletant, ses mouvemens respiratoires et circulatoires s’accélèrent, il s’échauffe peu à peu par la circulation qui, en charriant incessamment le sang de la périphérie