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tellement en retard sur l’Angleterre et les États-Unis surtout ; depuis quelques années, et malgré les difficultés créées par les circonstances, le nombre des assurances sur la vie tend à augmenter. Il en sera de même de l’usage des chèques, des viremens, des compensations ; rien ne l’activera davantage que la bonne administration et la solidité des institutions de crédit ; rien ne l’arrêterait plus qu’une défaillance de ces établissemens, dont la prospérité est d’intérêt public. Tout ce qui peut augmenter la valeur de leurs titres, la constitution de fortes réserves et la représentation de ces réserves par des Litres spéciaux, l’intérêt proprement dit séparé des dividendes, la publication des valeurs qui représentent le capital et les réserves, ce sont autant de mesures bonnes à introduire chez nous comme en Belgique.

Ces observations sur les perfectionnemens à introduire dans l’administration des sociétés financières ont d’ailleurs une portée générale plus opportune qu’à aucun autre moment. Les dépenses considérables de la guerre de 1870 et l’énorme rançon payée à la Prusse ont diminué le capital de roulement du pays, de même que les intérêts à payer pour les deux emprunts récens et la surcharge des impôts nouveaux se résument en prélèvemens sur le revenu de chaque citoyen. Il faut que le travail national augmente ses efforts pour supporter ces charges, et, comme la production ne peut s’accroître qu’avec un accroissement correspondant de consommation au dedans ou au dehors, il faut que les dépenses privées augmentent en même temps que le budget des dépenses publiques grossit. D’autre part, en attendant que l’épargne annuelle ait reconstitué le fonds de roulement nécessaire au travail national, il faut aussi que des moyens de crédit y aient pourvu et que la circulation ne soit ni amoindrie ni ralentie. Les établissemens de crédit peuvent et doivent jouer ce grand rôle. Quand on voit, comme en Angleterre, tant de transactions se liquider par de simples viremens de comptes, on comprend à quel point la bonne organisation des sociétés de crédit peut aider à la circulation et se prêter à l’activité des affaires, devenue pour nous une nécessité sociale. La multiplicité des comptes de dépôts, en agglomérant de grandes ressources, permet en outre aux sociétés financières de venir en aide, par des spéculations qui méritent d’être encouragées, au placement d’emprunts que le public recherche d’autant plus volontiers qu’il a plus de concurrent et dont il n’acquitte le prix que par des paiemens successifs. En attendant ces rentrées, souvent éloignées, la spéculation les escompte selon les besoins du trésor, dans l’intérêt même des souscripteurs, dont elle prend momentanément la place.

A coup sûr, le spectacle donné par notre pays en 1872 a dépasse toutes les prévisions ; nous ne voulons pas seulement parler du