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L’idée dominante des Américains est d’aller droit au but ; leur go ahead n’aime pas à se préoccuper des théories, ils veulent voir le résultat ; aussi sont-ils loin d’accorder à leur instruction le même temps que les Européens, et ces études abrégées doivent suppléer par de bonnes données pratiques aux études approfondies.

Ce problème n’est pas facile à résoudre, mais, en Amérique comme en Europe, l’instruction tend tous les jours à occuper un rang plus important ; aussi depuis une dizaine d’années le programme des études s’est-il considérablement augmenté, et il faut d’une à deux années pour acquérir les rudimens d’une instruction commerciale.

Les Américains ont pour maxime qu’il faut enseigner aux enfans ce qu’ils pratiquent dans la vie. Dans les écoles publiques, qui sont fréquentées par la majorité des enfans, le passage d’une classe à la classe supérieure n’est autorisé que lorsque l’élève a passé des examens satisfaisans en arithmétique. Ainsi l’arithmétique est prise pour critérium ; ce n’est pas qu’elle indique mieux que toute autre étude le degré d’intelligence des élèves, mais une bonne connaissance de l’arithmétique est plus appréciée des Américains. Les écoles de commerce ont dû tenir compte de cette opinion pour l’organisation de leurs cours.

Depuis une trentaine d’années que les écoles de commerce, business colleges, ont été introduites aux États-Unis, elles se sont beaucoup multipliées, et elles constituent aujourd’hui une branche très importante des établissemens spéciaux d’enseignement. L’instruction classique n’est pas tenue malheureusement en très haute estime, par la raison que les personnes qui ont fait les plus grandes fortunes ne doivent pas leur succès à la supériorité littéraire. Les jeunes gens élevés dans un tel milieu ne tiennent pas aux diplômes ; ils vont droit à l’apprentissage commercial, qui doit les conduire à la fortune, et ils fréquentent les écoles où ils peuvent se procurer en peu de temps les notions nécessaires pour leur faciliter l’exercice des professions lucratives.

Pour perfectionner cet enseignement, MM. Bryant et Stratton sont entrés en relation avec les institutions semblables qui existent dans les différentes villes de l’Union, et ils ont fondé des succursales, formant ainsi The International business College Association. Cette société ne comprend pas moins de quarante collèges dans les États-Unis et au Canada, de Portland à San-Francisco, et de Montréal à la Nouvelle-Orléans. Elle est coopérative quant à l’instruction, mais chaque collège ne dépend pour son existence que de lui-même. Plusieurs établissemens reçoivent des subventions des états ; dans ce cas, il y a des trustees ou fidéicommissaires nommés par l’état qui accorde la subvention ; mais on peut dire que l’intervention de ces commissaires est le plus souvent une gêne pour les directeurs intelligens et un obstacle aux améliorations dans le système d’enseignement.