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si noblement fréquentée? Je n’oserais trancher d’avance la question, et me garderais bien surtout de dire non. Le public est devenu à ce point fantasque et versatile que c’est probablement par sa qualité de Français et de tenorino d’opéra-comique que l’ex-pensionnaire de Favart passionnera le haut dilettantisme, qui ne jure que par Rubini et Mario, Tamberlick et Fraschini. a Monseigneur, disait autrefois l’abbé de Bernis au duc de Choiseul, qui lui refusait une place, vous m’empêchez de faire une petite fortune; très bien, j’en ferai une grande! » C’est exactement la situation de M. Capoul vis-à-vis de ses directeurs, refusant de céder à ses exigences. L’opéra-comique l’ennuyait, et c’est l’opéra-comique qu’il nous ramène aux Italiens avec Maria. Nous attendrons plus ample information, puisque nous n’avons encore jusqu’à pré sent que le Capoul de la première manière, l’agréable ténor de Fra Diavolo, de Marie et du Jour de bonheur. Nos renseignemens sur la nouvelle vocation de M. Capoul ne seront guère complets que lorsque nous l’aurons entendu dans quelque ouvrage du répertoire, par exemple la Sonnanbula, musique de chanteur, où vibre la corde émue et pathétique, et qu’on ne saurait aborder avec succès qu’en ayant dans l’âme et dans la voix l’accent et le style de l’école. Chanter le Rêve d’amour ou les Puritains n’est point le même art. Il est vrai que, le Théâtre-Italien proprement dit n’existant plus, on peut aujourd’hui parcourir à moindres frais la carrière de virtuose. Il s’agit tout simplement de s’enrôler dans une troupe d’élite, celle de Londres ou de Saint-Pétersbourg. M. Capoul savait bien qu’il retrouverait là son ancien répertoire, et qu’en se dénationalisant il ne se transformait qu’à demi, puisqu’il n’y a désormais de véritable Théâtre-Italien en Europe que celui où l’on joue des opéras-comiques français.


F. DE LAGENEVAIS.


ESSAIS ET NOTICES.

EXPLORATION NOUVELLE DE LA PALESTINE.

Description géographique, historique et archéologique de la Palestine, accompagnée de cartes détaillées, par M. V. Guérin[1].


Les publications érudites qui honorent la France sortent rarement du cercle restreint pour lequel, il est vrai, elles sont composées. Le public éclairé, qui aime à s’instruire, perd beaucoup à ne pas les suivre toujours avec assez d’attention : il s’étonnerait de l’intérêt général qu’elles présentent; il y verrait aussi par combien d’efforts notre pays maintient sa place dans la science. Quelques esprits chagrins n’ont guère d’éloges que pour les travaux qui nous viennent de l’étranger. Ce pessi-

  1. 3 vol. in-8o, Paris, Challamel, éditeur.