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donné tant de souci; mais le surveillé et le surveillant furent en lutte perpétuelle, et c’est le dernier, Pichon, qui dut céder sa place.

Les exigences de Napoléon étaient simplement insensées. Un traité pour l’arrangement des difficultés financières, entre l’empereur des Français et son frère, avait été signé à Berlin, le 22 avril 1808, par Malchus, conseiller d’état, et Daru, intendant-général de la grande armée. Ce traité distinguait d’abord entre les créances que pouvaient avoir les anciens souverains, états, abbayes ou corporations ecclésiastiques de la Westphalie sur des princes ou des particuliers étrangers au royaume, et celles qu’ils pouvaient avoir sur des nobles ou des particuliers sujets du royaume ou domicilies dans le royaume. Les premières. Napoléon se les réservait « en vertu du droit de conquête : » or l’électeur de Hesse-Cassel à lui seul avait prêté 12 millions au Mecklembourg, 4,600,000 francs à Waldeck, 2 millions à la Bavière, 2,600,000 à la Hollande, 3 millions à Bade et des sommes considérables à d’autres états. Les créances de la seconde catégorie, Napoléon les abandonnait à son frère, mais uniquement pour lui donner « les moyens d’augmenter et d’entretenir son armée. » Par l’article 2 de la constitution, Napoléon s’était réservé la moitié des domaines allodiaux des princes dépossédés « pour être employés aux récompenses que nous avons promises aux officiers de nos armées qui nous ont rendu le plus de services dans la présente guerre. » Plus tard, il avait déclaré qu’il lui fallait la moitié de tous les domaines des princes, allodiaux ou autres, protestant contre « le ridicule de telles distinctions. » Dans le traité de Berlin, il se contentait de 7 millions de revenus en domaines; or les domaines entiers de la Westphalie ne rapportaient que 12 ou 14 millions, et ne pouvaient atteindre qu’après de longues années de bonne administration un revenu de 18 ou 19 millions. Les contributions de guerre dues par la Westphalie à Napoléon étaient fixées à la somme totale de 26 millions, payables en dix-huit mois à dater du 1er mai 1808, au moyen d’obligations souscrites par les principaux propriétaires et banquiers du pays. Enfin Napoléon déclarait « ne point se charger des traitemens et appointemens, soit fixes, soit casuels, des fonctionnaires publics westphaliens, pensions, rentes et autres charges des provinces, pendant tout le temps de son occupation; » il laissait à son frère la faculté d’en user à cet égard « comme bon lui semblerait. » Il créait ainsi à la charge du budget westphalien un déficit équivalent à une année de dépenses pour un certain nombre de services[1], au total environ 8 millions.

  1. Non compris la liste civile et l’armée, qui en 1807 n’étaient point encore constituées.