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ment s’y donne en slave, — ou à Vienne; les cours s’y font en allemand. Sept gymnases royaux apprennent aux élèves les élémens des sciences et les langues mortes. Le grec et le latin y ont le pas sur l’histoire, sur les langues même du pays. Une culture littéraire médiocre est préférée aux connaissances positives qui forment les esprits sérieux. Quelques écoles techniques commencent, il est vrai, à enseigner les sciences. L’Autriche ne se fait pas de l’instruction la juste idée que s’en forment les Allemands du nord. Toute la science allemande est dans les provinces septentrionales. La vallée du Danube autrichien n’a que l’université de Vienne. Si on excepte Prague, ni la Bohême, ni les Slaves du sud, ni la Hongrie, ne peuvent citer une grande et florissante institution consacrée au haut enseignement. il y a là une preuve d’abandon intellectuel dont tout le pays doit se ressentir. Quant à l’instruction primaire en Dalmatie, très faible dans les villes, elle est nulle dans les campagnes. Sur 61,000 enfans, 10,000 seulement vont aux écoles.

Les travaux d’utilité publique sont conduits avec une extrême lenteur. En cinquante ans, l’administration n’a fait que deux routes importantes, celle d’Obrowatz aux confins croates, celle de Cattaro à la frontière monténégrine. Elle a réparé quelques digues, construit le pont de Trau, bâti deux ou trois forts, institué des écoles nautiques à Spalato et à Cattaro, supprimé les pandours, milice nationale, turbulente et indisciplinée qui souvent empêchait le cours régulier de la justice. Le pays est pauvre, il ne donne guère en abondance que du vin et de l’huile; encore ces produits mal préparés sont-ils mauvais : il faut porter l’huile en Italie et à Marseille, où elle est épurée; elle revient ensuite en Dalmatie pour être vendue à ceux-là mêmes qui l’avaient fabriquée tout d’abord. Les montagnes déboisées, les plaines arides, semées de cailloux, nourrissent de maigres troupeaux. C’est de la Bosnie et de l’Herzégovine que le Dalmate achète les bœufs et le blé qui lui manquent. Les conditions du colonat sont déplorables. Le paysan est maître de la ferme qu’il cultive pour un maître; le chasser est presque impossible; il la transmet, la partage, la laisse en friche à son gré. Il y a telle propriété qui est ainsi divisée en parcelles infiniment petites entre les fils et parens du colon sans que le propriétaire ait pu s’y opposer.

Certes les difficultés sont grandes; personne n’admettra qu’elles soient insurmontables. Les montagnes peuvent être reboisées; la vallée de la Narenta, si elle était assainie, comme l’a proposé depuis longtemps un des hommes qui connaissent le mieux la Dalmatie, M. Lanza, membre de la diète, serait d’une culture facile et productive. Le vin de Dalmatie, mauvais parce qu’il est mal