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L’AGITATION
POUR
L’ÉMANCIPATION DES FEMMES

I. L’Assujettissement des femmes (On the Subjection of Women), par M. John Stuart Mill, traduit par M. E. Cazelles. — II. La Femme pauvre au dix-neuvième siècle, par Mme Daubié, 3 volumes, couronnés par l’académie de Lyon. — III. De la Condition politique et civile des femmes, par M. Duverger, professeur de droit civil à la Faculté de Paris.


I.

Il est dans la destinée de notre temps de remettre tout en question. La condition des femmes n’a pas échappé à ce sort commun, l’esprit de critique et de réforme s’y donne pleine carrière. On réclame pour les femmes une nouvelle place dans l’état. Leur situation dans la famille n’est pas l’objet de moins de discussions. L’idée d’une subordination quelconque de la femme est vivement attaquée. L’égalité la plus absolue dans l’exercice des droits positifs, dérivée de l’égalité des droits naturels, est revendiquée comme une vérité théorique jusqu’à présent méconnue, que la pratique ne saurait se défendre de consacrer sans un déni de justice. De là une agitation qui se produit sous bien des formes et dans plus d’un pays. Depuis quelques années surtout, les livres, les journaux, les réunions publiques, nous en apportent le bruyant écho. On peut se demander si, dans ces réclamations, tout mérite d’être traité avec la même sévérité, s’il n’y a aucun grief fondé, aucun vœu raisonnable, si enfin on ne peut légitimement critiquer tel article des législations en vigueur, désirer aussi pour les femmes une part meilleure dans les conditions matérielles du travail. De telles questions, quoique soulevées par les agitateurs, fort heureusement ne sont pas liées d’une manière intime avec les thèses radicales; elles répondent à