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un rôle si actif dans les agitations de la France, et, comme la raison d’affaires est toujours celle qui préoccupe notre grave auteur, qui n’en fait pas moins à l’occasion leur part à la passion et à l’erreur, il a recherché les causes sérieuses d’une si vive et si opiniâtre intervention. Or, il le faut reconnaître, un aveugle fanatisme n’a point été le mobile des meneurs politiques du XVIe siècle. Le fanatisme n’a été qu’un instrument entre leurs mains, et la poursuite d’un grand intérêt a décidé du rôle de chacun. Dans la conduite de cet intérêt se sont distingués les habiles, cherchant d’abord à régler le jeu de la partie et puis à la gagner. Le tableau des conflits de ce temps-là est donc comme un grand échiquier déployé devant le lecteur attentif. Aussi bien le travail de l’historien de Sixte-Quint est en ce point d’un trop vif attrait pour que nous puissions négliger de l’y suivre.

L’idée de rapprochemens avec l’histoire contemporaine se présentera peut-être à la pensée, et nous ne l’écarterons pas, bien que M. de Hübner nous donne à cet égard l’exemple d’une réserve du meilleur goût. Notre malheureux pays est-il destiné à revoir les déchiremens politiques et les guerres religieuses du XVIe siècle? Si l’énergie des caractères répondait à la profondeur des divisions, j’en aurais certes l’appréhension décidée; mais au fond le retour de ces odieuses luttes n’a plus de chances de succès. L’agencement de la société moderne éloigne la crainte de la guerre civile et de ses résolutions audacieuses, renouvelées d’une autre époque. C’est mon espérance, tout en avouant que l’avenir garde encore le secret des solutions définitives de plusieurs questions redoutables. Quoi qu’il en soit, rétablissons, à l’exemple de M. de Hübner, la situation de la papauté en face des grands mouvemens du XVIe siècle et des guerres intestines de France.

L’église romaine traversait alors une des périodes les plus critiques qu’elle ait jamais parcourues. Au siècle précédent, elle avait déjà éprouvé un trouble profond par des causes nées dans son propre sein et par des causes provenant du monde extérieur. Dans le sein même de l’église, un schisme de quarante années avait déchiré la chrétienté et offert au monde le spectacle déplorable d’une scission qui produisit la concurrence de deux papes se succédant de compétiteur en compétiteur pendant près d’un demi-siècle, s’excommuniant l’un l’autre à l’envi et se partageant l’obédience chrétienne en une confusion si grande, que les plus grands saints et les plus éclairés ne surent souvent quel parti prendre. Catherine de Sienne, — personnage de grande autorité, — tenait pour Urbain VI, dans le temps que le B. Pierre de Luxembourg se déclarait pour Clément VII. Il fallut une coalition de conciles et de souverains pour mettre fin à ce qu’on nomme le grand schisme d’Occident (1417). Le respect et