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recherches procureront sans doute plus d’une découverte. Une espèce dont on n’a pas observé le cocon a été déjà plusieurs fois apportée en Europe : le papillon en est bien remarquable ; ses ailes, d’un vert-pomme, n’ont pas moins de 18 centimètres d’envergure, celles de la seconde paire, prolongées en manière de longues queues, portent des taches semblables à des yeux dont le centre est mi-partie vert et gris de lin[1].

Sur la Grande-Terre, les araignées abondent ; de grosses espèces peintes de vives couleurs établissent d’immenses toiles et confectionnent, pour loger leurs œufs, des coques d’un volume considérable. On a conçu l’idée de donner un emploi à cette soie fine, brillante comme de l’or, de certaines araignées ; mais la difficulté d’obtenir la matière en quantité notable doit sans doute faire écarter la pensée d’une sérieuse application industrielle. M. Vinson, qui a singulièrement mis à profit un séjour de trois mois à Madagascar, a recueilli une foule d’intéressantes observations sur ces animaux ; il a décrit les habitudes des grosses épéires dressant au-dessus des rivières des toiles accrochées aux arbres des deux bords et permettant à de petites araignées de vivre sous leur protection. Tout le monde à l’automne remarque dans les jardins les toiles régulières de notre épéire commune ; d’après cet exemple, on imagine l’effet pittoresque de toiles vingt fois plus grandes jetées comme des ponts au-dessus des torrens.

Mieux encore que les plantes, les animaux sur lesquels nous venons d’appeler l’attention montrent combien l’île de Madagascar est séparée du reste du monde ; chaque classe offre des types des plus caractéristiques, toutes les espèces sont particulières au pays. S’il en est, comme chez les oiseaux et les insectes lépidoptères, qui habitent en d’autres lieux, il est aisé de les reconnaître pour des étrangères. Lorsque nous cherchons à saisir des ressemblances entre la faune de la Grande-Terre et les faunes de l’Inde et de l’Afrique, partout nous les trouvons peu marquées. Des genres de mammifères et d’insectes très répandus sur les continens ne sont en aucune façon représentés dans la grande île. Cependant des animaux vivant à une époque ancienne, aujourd’hui disparus, attestent que le caractère spécial de la faune de Madagascar n’a pas toujours été aussi prononcé. À cet égard, des découvertes récentes vont nous conduire à un nouvel ordre de considérations. Nous avons parlé de la grande île africaine que nous connaissions jusqu’à ces dernières années ; à présent, il convient d’examiner ce qu’ajoutent à notre science les explorations de M. Alfred Grandidier et les études de quelques autres investigateurs.


EMILE BLANCHARD.

  1. Attacus cometes.