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voisine du continent africain, ne rappelle l’Afrique par la végétation que dans certains traits, et semble offrir des analogies un peu plus prononcées avec l’Asie tropicale ; mais au sujet de ces relations diverses d’un si réel intérêt, la réserve est encore nécessaire ; il sera difficile de conclure d’une manière définitive tant que la flore du Mozambique n’aura pas été parfaitement étudiée. On remarque à Madagascar plusieurs végétaux qu’on ne distingue pas de ceux de l’Inde : pour quelques-uns, l’identité reste douteuse ; pour les autres, elle est évidente, et dans ce dernier cas il est besoin d’examiner si la présence de ces végétaux sur la grande île est toujours due soit à l’intervention de l’homme, soit à des circonstances particulières ; l’attention des savans n’a pas encore été dirigée de ce côté.

Dès le temps où des Européens vinrent s’établir sur la Grande-Terre, les Malgaches se livraient à la culture de plusieurs végétaux ; ils avaient le riz, la canne à sucre, différentes espèces d’ignames. D’où les tenaient-ils ? Personne ne paraît s’être inquiété de la provenance de ces plantes. À cet égard, une recherche approfondie serait peut-être fort instructive. On a fait déjà de véritables efforts pour retrouver l’origine des peuples de Madagascar : les traits du visage, des coutumes, des superstitions ont conduit à des rapprochemens ; des mots de la langue ont été regardés, non sans raison, comme des indices d’une parenté avec des nations d’une autre partie du monde, — on ne s’est pas douté que par l’examen et la comparaison des plantes cultivées il ne serait pas impossible d’être amené sûrement au point de départ.

Flacourt nous a informés que les Malgaches possédaient plusieurs variétés de riz ; la culture de cette céréale, soit dans les bas-fonds, soit sur les collines, était alors répandue chez la plupart des peuples de la grande île. Il est permis de croire que le riz a été introduit par les Arabes ; pour la canne à sucre, surtout pour les ignames, on doit probablement en chercher ailleurs l’origine. Notre premier historien de Madagascar a énuméré les diverses sortes d’ignames cultivées ; quelques-unes d’entre elles échappent encore à la détermination scientifique. Ces végétaux, à racines énormes, sont de la famille des aroïdées[1] ; ils se rapportent au genre colocasia[2], plantes de haute taille, ayant de larges feuilles, de jolies fleurs, un port superbe ; elles produisent grand effet lorsqu’on les voit en masses dans un site pittoresque, comme par exemple sur la rive droite de l’Ivondrou. Cultivées de temps immémorial dans l’Inde et

  1. Une espèce de cette famille, qui se trouve dans nos bois, est connue de tout le monde sous le nom vulgaire de gouet et de pied-de-veau (Arum vulgare).
  2. Colocasia esculentum, C. antiquorum.