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toute espèce, linge, charpie, vins, médicamens, elle a organisé quatorze ambulances volantes, et, chaque fois que des combats ont été livrés, elle a envoyé, sous la conduite de M. le docteur Chenu, cent cinquante voitures pour recueillir pendant l’action les blessés sur le champ de bataille.

Le corps médical a fait des prodiges de courage et de science. Les corporations religieuses ont rivalisé de zèle et de charité ; pour reconnaître les services qu’elles ont rendus, il aurait fallu les nommer toutes, depuis les petites sœurs des pauvres jusqu’aux dominicains d’Arcueil et aux jésuites de Vaugirard. Le récit détaillé de tous les actes de dévoûment aurait demandé plusieurs volumes, et l’auteur a dû nécessairement se borner ; mais son livre n’en est pas moins très intéressant ; quand on l’a lu, on se sent rassuré pour l’avenir en voyant tout ce que la France renferme de patriotisme et de sentimens généreux. Si les enseignemens de l’histoire ne sont pas un vain mot, si le présent n’est que le passé qui recommence, on peut croire que les épreuves que nous venons de traverser, quelque douloureuses qu’elles soient, n’abattront pas notre fortune, car nous en avons subi vingt fois dans le passé de plus terribles encore. La vieille France a été en proie à des famines périodiques qui tournaient, comme le dit Saint-Simon, le royaume en un vaste hôpital de mourans et de désespérés. » Au XVIe siècle, elle a vu en vingt ans 800 000 individus tomber victimes de la guerre et de la misère. Elle a lutté contre les invasions anglaises, les invasions espagnoles, les coalitions européennes ; elle a été réduite parfois à une détresse si profonde que Charles VI n’avait pas même de quoi payer le baptême de ses enfans, que le plus populaire de ses rois, Henri IV, était forcé au début de son règne d’emprunter quelques centaines d’écus à ses maîtresses, et que Louis XIV en 1713 ne pouvait se procurer 4 millions argent comptant qu’en souscrivant à des banquiers hollandais pour 32 millions de traites. Cependant au milieu de ses désastres la France a toujours ; grandi, car elle possède une vitalité qu’on ne retrouve chez aucun autre peuple ; il suffit de quelques années de paix, de bonne administration, de sagesse dans la nation ou le gouvernement, pour ramener sa prospérité, et, dans les continuelles alternatives d’abaissement et de grandeur qui sont comme le fonds même de son histoire, elle se relève plus vite encore qu’elle ne tombe.


Ch. Louandre




Traité élémentaire de chimie organique, par M. Berthelot ; Paris, Dunod, 1872. — Traité de chimie technologique et industrielle, par Fr. Knapp, traduit sous la direction de E. Merijot et A. Debize ; Paris, Dunod, 1872.


Il y a deux sortes de chimie, celle des savans, dont peu de personnes pénètrent les secrets, et celle des industriels, que tout le monde devrait connaître, car on en fait sans cesse l’application, dans les actes