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l’enseignement pastoral, et s’il admettrait qu’un prédicateur portât dans une chaire protestante le dogme de l’immaculée conception. La réponse fut affirmative. Sur les protestations de la gauche, l’habile orateur lui fit remarquer qu’elle admettait elle-même une limite à cette liberté de l’enseignement, et qu’il ne restait plus par conséquent qu’à la déterminer conformément à la foi de l’église. Prétendre, ajoutèrent les orthodoxes, que l’on condamne à l’hypocrisie le jeune pasteur que l’on met en demeure d’accepter la charte de son église est une dérision. Ne manquerait-il pas bien plutôt à la sincérité en récitant une liturgie à laquelle il ne croirait plus ? Il n’est pas nécessaire d’abjurer la dignité de la pensée pour accepter en connaissance de cause une profession de foi qui laisse aux recherches de l’esprit un champ très étendu. La profession de foi au sein d’une église chrétienne est une protection pour la liberté du théologien ; personne n’a le droit de rien exiger de lui dès qu’il a adhéré à la formule très large qui a été proposée à son acceptation.

Le vote eut lieu le 5 juillet. Il eut toute sa clarté, car tous les amendemens qui en eussent affaibli la portée furent écartés. Dès ce jour, la tâche du synode était terminée. On essaya bien de raviver le débat à l’occasion de l’église de Paris, où les deux tendances se livrent depuis tant d’années une lutte si vive. Le tiers-parti aurait voulu l’apaisement par une sorte de partage des églises en créant un second consistoire. Le synode ne voulut pas se déjuger pour un cas particulier, quelque important qu’il fût. Après avoir émis quelques vœux, sur lesquels nous reviendrons, et adopté une adresse aux églises, il fut clos le mercredi 11 juillet par un discours de son modérateur. Cette laborieuse session avait duré un mois.


IV

Hegel attribue tout progrès dans les sphères diverses de la vie à une contradiction latente qui, en se manifestant, détruit les organisations imparfaites pour leur substituer une forme supérieure. Qu’on mette la liberté morale où le grand dialecticien du fatalisme logique mettait la nécessité, et l’on reconnaîtra qu’il a raison. Sa règle peut s’appliquer au synode de l’église réformée, qui n’a fait que mettre en lumière une situation générale dans les églises constituées sur le même type. Ce qui ressort avec évidence de ses délibérations, c’est précisément une de ces contradictions tout ensemble destructives et fécondes. En effet, on trouve en présence au sein du protestantisme officiel français deux droits opposés qui ne peuvent se concilier dans sa forme actuelle, un droit religieux et un droit historique. Le droit religieux, c’est la revendication par le