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l’économie. Il était arrivé bientôt à manier l’agent électrique avec une dextérité remarquable, à discerner avec une clairvoyante promptitude les points où il convenait dans chaque maladie d’appliquer les pôles de la pile. Ceux qui, comme nous, ont été en 1864 témoins de ses expériences à la Charité en ont conservé le souvenir le plus net. Les méthodes de M. Duchenne étaient à peu près les seules reçues et pratiquées en France avant que Remak fût venu démontrer aux médecins de Paris l’efficacité de l’électrisation par les courans constans dans les cas où la faradisation restait impuissante. L’enseignement du praticien de Berlin porta ses fruits. Un jeune médecin d’avenir, Hiffelsheim, commençait à répandre à Paris l’emploi du courant constant comme moyen thérapeutique quand la mort l’enleva en 1866 dans la fleur de l’âge. Un autre médecin qui a pu profiter des leçons de Remak, M. Onimus, a repris les travaux interrompus d’Hiffelsheim, et s’occupe aujourd’hui de constituer l’ensemble des procédés électrothérapiques en les subordonnant à une connaissance rigoureuse des lois électro-physiologiques[1]. On va voir, par quelques exemples choisis dans la masse des faits publiés à ce sujet, jusqu’où s’étend actuellement l’efficacité de ces procédés.

L’expérience a établi que dans certaines conditions le courant électrique resserre les vaisseaux, et par suite ralentit l’afflux du sang dans les organes. Or un grand nombre de maladies sont caractérisées par un trop rapide afflux sanguin, par ce qu’on appelle des congestions. Certaines formes de délire et d’excitation cérébrale, ainsi que beaucoup d’hallucinations des divers sens, sont dans ce cas, et guérissent parfaitement par l’application du courant électrique sur la tête. Nul organe ne possède un système vasculaire aussi complexe et aussi délicat que le cerveau, et nul organe n’est aussi sensible à l’action des causes qui modifient la circulation. C’est pour cela que les affections qui ont leur siège dans l’encéphale sont particulièrement faciles à traiter par l’électricité. Cette dernière, bien appliquée, est souveraine contre les crises cérébrales, les conceptions délirantes, les migraines, les insomnies, etc. Les premiers médecins qui se servirent du courant avaient parfaitement saisi cette heureuse influence du fluide galvanique sur les troubles du cerveau ; ils avaient même songé à en tirer parti pour le traitement de la folie. Les recherches n’ont pas été continuées dans cette direction, mais les faits publiés par Hiffelsheim autorisent à croire qu’elles ne seraient pas infructueuses. Ces faits témoignent

  1. Dans le concours extraordinaire ouvert récemment par l’Académie des Sciences pour l’application de l’électricité à la thérapeutique, le premier prix a été donné à MM.  Onimus et Legros, et le deuxième à deux physiologistes russes, MM.  Cyon.