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LA REPUBLIQUE
ET
LES CONSERVATEURS

Malgré les efforts que certains partis font pour l’égarer et pour l’effrayer sur son avenir, la France présente aujourd’hui au monde un étonnant spectacle. Elle n’a pas d’institutions établies, et elle s’en passe à force de sagesse : son gouvernement ne peut se maintenir que grâce à l’assentiment quotidien du pays ; il est remis en question tous les jours, et il se montre plus solide, plus robuste dans sa fragilité même que beaucoup de pouvoirs solennellement constitués et entourés de toutes les garanties légales. C’est qu’il s’appuie sur l’opinion publique, sur le patriotisme et sur le bon sens de la nation. Les factions qui voudraient le culbuter, et pour qui la tranquillité du pays est le plus grand des malheurs, s’écrient tous les jours que cela ne peut durer. En dépit de leurs prédictions, cela dure, cela se fortifie ; l’ordre règne, le travail renaît, nous refaisons nos finances, nous libérons notre territoire, et ce gouvernement de fait, ce misérable provisoire dont nos grands politiques raillent ou déplorent la faiblesse, trouve en deux ans 5 milliards à emprunter au nom de la France. En présence de ces résultats positifs, la nation reprend confiance, et elle se dégoûte des charlatans qui voudraient de nouveau la troubler pour se poser encore une fois en sauveurs.

Cependant « tout va mal. » Telle est la formule banale des partis dépossédés ou des ambitions mécontentes, et beaucoup d’honnêtes gens alarmés la répètent sans la comprendre. « Tout va mal » aux yeux des uns parce que l’empire est tombé, aux yeux des autres parce que la fusion n’a pas réussi, ou bien parce que le gouvernement porte le nom odieux et redouté de république. Les plus